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Qui était Thérèse Humbert, la reine de l’escroquerie ?

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Message par Admin Mar 9 Fév - 19:31

Qui était Thérèse Humbert, la reine de l’escroquerie ? Sans5445



Correspondance, Gautier DEMOUVEAUX

Par ses mensonges et son audace, cette fille d’agriculteur réussit à se faire passer pour l’une des plus riches héritières de France à la fin du XIXe siècle. Thérèse Humbert va profiter de cette situation pour emprunter des millions de francs pendant près de vingt ans, avant que le subterfuge ne soit découvert…

Lorsque débute le procès de Thérèse Humbert et de ses complices, le 8 août 1903, la France entière se passionne pour cette affaire. Les journalistes assistent en masse à l’audience afin de relayer les débats, et décrire celle qu’on qualifie déjà « d’escroc du siècle ».

Tous veulent savoir qui se cache derrière ce personnage à la forte personnalité qui a su s’immiscer dans les plus hautes sphères du pouvoir et séduire le tout-Paris – en lui empruntant des millions de francs qu’elle ne leur remboursera jamais ! C’est un véritable vaudeville qui se joue dans le prétoire, et Thérèse Humbert en est la vedette.

Le grand public et la presse traitent cette escroquerie avec humour, tandis que les chansonniers et autres dessinateurs satiriques s’en donnent à cœur joie pour railler les pigeons de « la grande Thérèse », tous ces politiciens, banquiers et autres créanciers qui sont tombés dans le panneau.

Il faut dire que Thérèse Humbert est passée maître dans l’art de l’affabulation : « Le don créatif de Thérèse était spontané et inné, raconte Hilary Spurling, dans le livre qu’elle consacre à cette affaire. Elle combinait la subtilité psychologique d’un acteur confirmé à l’exubérance narrative d’un romancier. Si elle avait choisi les livres, au lieu de la vie réelle, comme moyen d’expression pour ses fictions romantiques à propos de titres égarés, de coffres-forts, d’héritages surprises et de parents longtemps perdus de vue, elle serait devenue un romancier à gros tirage du XIXe siècle… »


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août 1903, le procès Humbert passionne l’Hexagone. Pendant près de vingt jours, les débats au tribunal de Paris sont suivis et relayés par la presse, tel un feuilleton… (Photo : Dorville / Wikimédia Commons)


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Le 8 août 1903, le procès de Thérèse Humbert et de ses complices – ses deux frères et sa sœur ainsi que son mari Frédéric – s’ouvre devant la cour d’assises de Paris. (Illustration : Wikimédia Commons)

Un personnage imaginé au fil des années

Ce talent, elle le travaille depuis sa plus tendre enfance. « Elle ment comme l’oiseau respire », comme le raconte à la barre un témoin qui l’a connue enfant.

Thérèse Daurignac, son nom de jeune fille, est née le 10 septembre 1855 à Aussonne, un village de Haute-Garonne situé à quelques kilomètres de Toulouse. « Son père était déjà une personnalité à part », écrit l’historien Frédéric Chauvaud, dans un chapitre de l’ouvrage collectif Impossibles victimes, impossibles coupables, les femmes devant la justice (XIXe et XXe siècles).

« Sa vie, en effet, ne se confond pas avec la banalité du quotidien. Abandonné à Toulouse en 1801, élevé par la municipalité puis par un prêtre, il est reconnu, presque quarante ans plus tard, par la femme d’un horloger. Il se marie avec la fille d’un riche fermier, perçoit une partie de l’héritage, achète un « petit Castel », fonde une agence matrimoniale dont il est le directeur, change de nom, devient le comte d’Aurignac. Père de quatre enfants, dont Thérèse, il « tire le diable par la queue », échafaude cent projets pour gagner de l’argent et use d’un stratagème original pour faire patienter ses créanciers… »

Le paternel s’invente un « oncle d’Amérique » à la tête d’une fortune colossale qui lui a légué sa fortune, et il n’hésite pas à présenter une liasse de parchemins censés convaincre ses créditeurs, un moyen de donner à ses visiteurs méfiants une preuve visible de ce legs américain dont il ne peut jouir immédiatement « puisque la justice est particulièrement lente ».

Un mariage parfait pour lancer son stratagème

Thérèse a été à bonne école et développera plus tard – de manière beaucoup plus élaborée – la ruse paternelle. Pour le moment, la jeune fille persuade ses amies de mettre en commun leurs bijoux afin de faire croire à leurs prétendants qu’elles sont riches.

C’est en usant de ce stratagème qu’elle arrive à séduire, en 1878, un étudiant en droit de deux ans son cadet. Ce jeune homme n’est pas n’importe qui. Si Frédéric Humbert n’a pas encore de situation, son père est un notable : il est alors procureur général à la Cour des Comptes mais aussi sénateur.

Lorsque ce dernier apprend que son rejeton en pince pour cette jeune femme commune, sans fortune et au léger zozotement, et qu’il souhaite lui demander sa main, le paternel s’oppose d’abord au mariage. C’est alors que Thérèse va servir, pour la première fois, son mensonge, qui s’étoffera au fil des années.

De la vieille cousine au vieux parrain américain


Pour donner des arguments à son prétendant et convaincre son futur beau-père, elle invente alors une histoire et raconte qu’elle est l’unique héritière d’une vieille cousine célibataire, propriétaire du château de Marcotte, dans le Gers. Mourante, cette dernière est sur le point de lui léguer toute sa fortune. « Le jeune avocat et le savant professeur y crurent, mais une fois le mariage célébré, il fallut se rendre à l’évidence : l’âme charitable de Marcotte n’existe pas et l’argent que Thérèse avait fait miroiter est tout aussi chimérique, précise Frédéric Chauvaud. Pour le fils de Gustave Humbert, la duperie ne se prolongera guère. Son rêve écroulé, il se réveillera complice. Pénétré d’admiration pour la magicienne qui l’a pris dans ses filets, il se fera son servant, son associé… »

Les deux jeunes mariés quittent la région de Toulouse et emménagent à Paris, dans un modeste appartement de la rue Monge, à deux pas du Jardin des Plantes.

Pas question pour Thérèse Humbert de vivre chichement. Elle reprend son refrain et imagine cette fois un riche Américain qui vient de mourir, et aurait légué l’ensemble de sa fortune (sous forme de bons au porteur) à Thérèse. Ce Robert Henry Crawford est personnage inventé de toutes pièces.

Un jour, Mme Humbert le présente comme son vieux parrain d’Amérique qui a fait fortune ; un autre, il s’agit d’un Américain aisé à qui Thérèse a sauvé la vie, lors d’un voyage en train. Seul le montant reste le même : 100 millions de francs, une fortune colossale, qui ferait de Thérèse Humbert l’une des femmes les plus riches de l’Hexagone !

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Avec son histoire d’héritage, Thérèse Humbert séduit une partie des élites politico-financières du pays, et de nombreux pigeons, attirés par l’espoir de juteux bénéfices, lui prêtent des sommes colossales. De quoi maintenir le train de vie opulent de Mme Humbert et des siens. (Illustration : collection particulière / Wikimédia Commons)

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L’affaire Humbert inspira aussi les chansonniers de l’époque. (Illustration : Wikimédia Commons)


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Message par Admin Mar 9 Fév - 19:48

La grande vie à crédit

Seule ombre au tableau : ledit Crawford aurait rédigé deux testaments et couché, sur le second, ses neveux, qui vivent à New York. En attendant que l’affaire se règle et que Thérèse obtienne gain de cause – elle clame partout que la partie est gagnée d’avance – elle et son mari vivent à crédit et empruntent de l’argent, en promettant de rembourser ces dettes avec un taux d’intérêt très intéressant.

L’appât du gain va séduire de nombreuses personnes, au premier rang desquels Gustave Humbert, devenu entre-temps ministre de la Justice. Le beau-père de Thérèse se porte caution morale lorsque son fils et sa bru abandonnent leur logement trop exigu et font l’acquisition d’un hôtel particulier, rue Forturry.

« La même année, le jeune couple achète, près de Melun, avec de l’argent qu’il n’a pas, le château de Vives-Eaux, continue l’historien Frédéric Chauvaud. À Paris, ils quittent en 1885 leur hôtel particulier pour un autre, plus luxueux, situé avenue de la Grande-Armée. Supposé riche, bénéficiant d’une célébrité certaine, le couple reçoit, est nom obligatoire, donne des fêtes sur lesquelles la rubrique mondaine des journaux s’attarde. »

Chez les Humbert, l’argent coule à flots et lors des soirées organisées par Thérèse, on croise du beau monde ! Des banquiers, des membres du gouvernement, des aristocrates… Autant de prêteurs qui se ruent pour séduire Mme Humbert afin d’en tirer des juteux bénéfices à venir.

« L’orgueil de Thérèse prend un tour ambigu, elle se pique à son jeu, elle renchérit sans cesse sur ses propres rêves, elle finit par croire peut-être à la réalité de son mythe, relate, en 1930 dans le magazine Détective, un certain Jean France, un ancien agent de la Sûreté générale qui aurait enquêté à l’époque sur l’affaire. On voyait partout cette brune solide, couvertes de toilettes éclatantes, aux grandes journées de courses, aux galas, dans les salons, aux réceptions diplomatiques… » Et à ses côtés, son fidèle époux, Frédéric, qui s’est fait élire député de Seine-et-Marne.

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En 1930, près de trente ans après l’affaire, Thérèse Humbert faisait encore la une du magazine Détective… (Illustration : Wikimédia Commons)

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Ce personnage haut en couleur a marqué la société de son époque. Une partie de l’opinion publique en a même fait une sorte d’héroïne. En 1983, l’histoire de Thérèse Humbert est adaptée à la télévision, avec Simone Signoret dans le rôle-titre. Dans une interview, l’actrice déclare son admiration pour cette femme, « un chef de gang qui a réussi un coup de génie en dérobant des millions sans faire couler une goutte de sang, et en arnaquant des personnes plus malfaisantes qu’elle… » (Photo : Wikimédia Commons)


Une arnaque bien rodée


Pendant près de vingt ans, les Humbert vont mener grand train, empruntant toujours plus, versant quelques intérêts à leurs créditeurs avec l’argent des nouveaux dindons de la farce.

Pour continuer à convaincre, Thérèse ne recule devant rien. Elle fait passer ses deux frères pour les neveux Crawford, en voyage en France. Elle va même jusqu’à porter plainte contre eux devant le tribunal pour non-respect de l’arrangement qu’ils auraient enfin trouvé !

« Dès qu’un prêteur semblait plus curieux que les autres, s’inquiétait des garanties, on l’accablait de pièces judiciaires, les doubles des jugements obtenus contre les frères Crawford, poursuit le policier. Parfois, un des aspirants usuriers discutait dans le bureau de Thérèse. Alors celle-ci, d’un geste théâtral, ouvrait grande la porte de son coffre-fort où étaient rangés, tassés, des paquets soigneusement enveloppés et scellés à la cire rouge. Pendant vingt ans, la prestigieuse illusionniste tint son public. Mais un jour, brusquement, tout cassa… »

La chute après vingt ans d’opulence

Au fil des années, la rumeur enfle, Thérèse Humbert ne serait pas celle qu’elle prétend être. François Mouthon, un journaliste du quotidien Le Matin, recueille de nombreux témoignages de prêteurs qui commencent à trouver le temps long. Il commence à parler d’arnaque, tandis que l’un des créanciers saisit pour la première fois la justice, afin que soit tranchée une fois pour toutes cette histoire d’héritage et réclame, en attendant, la mise sous séquestre par la justice de toutes les valeurs de la succession.

Le 2 mai 1902, le tribunal de Paris ordonne l’ouverture du coffre de Thérèse Humbert et l’inventaire des titres financiers. Quand la police et les huissiers se rendent au domicile des époux Humbert, ils trouvent la maison abandonnée et le coffre vide.

Une enquête est diligentée et un mandat d’arrêt international est lancé. Le 20 décembre 1902, la famille est arrêtée à Madrid, et extradée en France. À leur arrivée à Paris, Gare du Nord, c’est l’effervescence. Tout le monde veut voir cette fameuse femme qui a berné pendant aussi longtemps le tout-Paris !

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Au bout de vingt ans, le subterfuge s’effondre. La justice ordonne la saisie des titres issus de l’héritage, entreposés dans le coffre-fort de Mme Humbert. Lorsque la police arrive, le coffre est vide, et le couple s’est volatilisé. (Illustration : Wikimédia Commons)


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Sept mois après leur fuite de France, Thérèse Humbert est arrêtée à Madrid avec son mari et sa fille, ainsi que ses deux frères et sa sœur. (Photo : Wikimédia Commons)


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L’extradition et le retour de la famille Humbert à Paris attire une foule considérable Gare du Nord et fait la une des journaux. (Photo : Wikimédia Commons)

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À l’époque, le procès Humbert est qualifié par la presse d’« escroquerie du siècle » et a un retentissement énorme dans toute la France. Des cartes postales sont même éditées à cette occasion. (Photo : Wikimédia Commons)


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Qui était Thérèse Humbert, la reine de l’escroquerie ? Empty Re: Qui était Thérèse Humbert, la reine de l’escroquerie ?

Message par Admin Mar 9 Fév - 19:57

Le spectacle continue au procès

Huit mois plus tard, le 8 août 1903, le procès de « l’affaire Humbert » s’ouvre devant la Cour d’Assises de la Seine. Pour sa défense, Thérèse a droit à un ténor du barreau : maître Labori, avocat du capitaine Dreyfus quelques années auparavant.

Tout au long du procès, l’arnaqueuse soutient que toute cette histoire est vraie. Face aux preuves, elle change sa version en affirmant à la barre que le fameux Crawford existe bien, mais qu’il ne s’appelle pas ainsi. Il s’agirait en fait d’Edmond-Vital-Victor Régnier.

« Présenté comme un « aventurier », au mauvais sens du mot, il est celui qui aurait servi d’intermédiaire entre Bazaine et Bismarck en 1870 pour obtenir la reddition de Metz où était encerclée, à partir du 20 août, l’armée du Rhin, précise dans son ouvrage l’historien Frédéric Chauvaud. Les 100 millions des Crawford seraient ainsi le prix de la trahison. Outre l’énormité de cette révélation, pitoyable pirouette, Régnier n’était pas mort à la date supposée du testament… »

Pour avoir escroqué près de 60 millions de francs, Thérèse Humbert et son mari seront condamnés à cinq ans de prison ferme. Après leur libération, ils mèneront une vie beaucoup plus chiche et discrète. Thérèse Humbert serait morte dans l’oubli général, pour certains en 1918, pour d’autres dans les années 1930. Mais la légende raconte qu’elle aurait émigré aux États-Unis et aurait tenté de refaire sa vie à San Francisco…

Pour bon nombre de ses contemporains, les moins fortunés, « l’escroquerie du siècle » n’a pas suscité que de l’indignation. Thérèse représente une sorte d’Arsène Lupin, une arnaqueuse qui a su prendre une revanche sur l’existence et sur les « gros qui ne songent qu’à s’engraisser ».

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Les débats sont suivis par de nombreux journalistes, dessinateurs et autres caricaturistes qui n’hésitent pas à croquer avec humour ce personnage haut en couleur. (Illustration : Wikimédia Commons)

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Acculée par le juge, Thérèse Humbert change sa version et annonce à la barre que le fameux Crawford se nomme en fait Régnier, celui qu’on considère comme le traître, responsable de la reddition de Sedan en 1870, face aux Prussiens. (Illustration : Wikimédia Commons)

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Malgré les accusations et ses déclarations contradictoires, celle qu’on appelle maintenant « la grande Thérèse » séduit une partie des jurés. Cerveau de l’escroquerie, elle s’en sortira avec seulement cinq ans de prison. Une peine très légère au vu des circonstances. (Illustration : Wikimédia Commons)

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