De Paimpol à Terre-Neuve : la vie d'enfer des graviers
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De Paimpol à Terre-Neuve : la vie d'enfer des graviers
Gens de terre, gens de mer. Le Bosco de Kerpalud, dernier livre de Luc Corlouër, inspiré des recherches de Charles Le Goffic, décrit la vie de jeunes « graviers » à Terre-Neuve. L'histoire de Paimpolais en enfer.
Gens de mer d'aujourd'hui, connaissez-vous la douloureuse histoire des graviers d'hier ? Ces enfants et jeunes hommes du pays de Paimpol presque réduits à l'esclavage du côté de Terre-Neuve, dès 1690. Le gravier tenait son nom de son lieu de travail : les grèves ou graves. Des plages de galets, exposées au vent du Nord, la main-d'oeuvre à bas prix faisait sécher la morue.
Charles Le Goffic (1863-1932) a décrit leur vie (où leur enfer). En 1903, dans la Revue des Deux Mondes, l'historien leur consacre un sujet intitulé « une traite d'enfants au XIXe siècle ». Cet article (dont s'est notamment servi l'écrivain Luc Corlouër) a permis d'améliorer leurs conditions de vie en dénonçant le système de quasi-servitude qui leur était imposé. En 1935, le père Yvon (1888-1955), aumônier des terre-neuvas, décrira également des conditions de vie toute aussi difficiles dans son livre Avec les bagnards de la mer.
En 1889, le Journal de Paimpol dresse pourtant de ces graviers un portrait très sommaire, voire idéalisé. Ils sont alors de « forts gaillards âgés de 16 à 21 ans ». Envoyés par leur famille chez un notaire pour conclure un contrat d'engagement, les graviers ont passé une rapide visite médicale, le prix est débattu. S'il l'accepte, le jeune homme reçoit une avance et retourne chez lui en attendant le jour de l'embarquement. « Les candidats sont le plus souvent des habitants du fond des terres (Ploëzal, Bégard, Pontrieux, Quemper-Guézennec, Plouëc...) qui, pour beaucoup, n'ont jamais vu la mer. »
« Parmi leurs déjections »
Leur recrutement se fait à domicile, dans les foires ou chez des matrones qui profitent de l'ignorance des règles maritimes des candidats. Une fois embarqués, sur les goélettes à Paimpol ou Saint-Malo et considérés « comme du fret », les graviers (âgés de 12 à 18 ans) passent 15 à 20 jours à fond de cale jusqu'à leur débarquement à l'île aux chiens (19 graves dès 1764), à la fin de l'hiver Nord-Américain.
« Beaucoup souffraient du mal de mer. Ils vivaient parmi leurs déjections. La cale n'était jamais lavée. Personne ne s'occupait d'eux... Au sortir du cap, le froid commençait à bleuir la peau », raconte Le Goffic.
« Les reins brisés »
De mars à septembre, une fois débarqués, les graviers étaient organisés en équipes d'une vingtaine. Un chef et un sous-chef (souvent basque) avaient toute autorité sur eux. Les capitaines des navires de pêche les employaient dans des conditions extrêmes. Réveillés à 4 h, les graviers allaient chercher du sel puis se rendaient au magasin pour y charger la morue sur des civières.
« Le plus dur, poursuit un témoignage collecté par Le Goffic, c'était le transport des civières : leurs charges n'étaient jamais inférieures à 100 kg. Du chauffe-eau à la grave, la distance n'est pas grande mais il fallait faire le voyage une soixantaine de fois matin et après-midi... On en sortait les reins brisés. Corrodés par le sel, le bout des doigts, les mains cassaient et saignaient au moindre choc... »
« L'atroce puanteur »
Usés, les jeunes gens regagnaient alors les cabanes qui leur servaient d'abris. « On était là plus à l'étroit qu'à bord... Des niches de forme rectangulaire disposées sur deux rangs faisaient le tour de la pièce... Les toits étaient de vraies passoires... Faute de poêle et pour ne geler tout vif, les malheureux gardaient leurs abris et leurs cirés... Les paillots gonflaient, pourrissaient, grouillaient de vermines aux premières chaleurs. C'était alors une sorte de supplice : l'atroce puanteur de l'atmosphère, la cabane n'avait pas de fenêtre. »
http://www.ouest-france.fr/bretagne/paimpol-22500/de-paimpol-terre-neuve-la-vie-denfer-des-graviers-4033006
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