Pierre Ier de Bretagne, un Capétien sur le trône ducal breton.
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Pierre Ier de Bretagne, un Capétien sur le trône ducal breton.
Pierre Ier de Bretagne (vers 1187-1250) est issu de la famille royale capétienne.
Il est l’arrière petit-fils du roi de France Louis VI le Gros (1108-1137). Son père, Robert II de Dreux, est le cousin germain du roi Philippe Auguste (1180-1223). En tant que cadet, ses parents avaient envisagé de lui faire embrasser une carrière ecclésiastique. Mais son tempérament fougueux les avait obligés à y renoncer rapidement. Selon certains historiens, c’est cet épisode de jeunesse qui valut à Pierre le surnom de « Mauclerc ». Cependant, on ne peut écarter l’hypothèse qu’il le tint de ses démêlés futurs avec les évêques bretons au cours et après son règne, comme nous le verrons.
Blason de Pierre Ier de Bretagne
Quoi qu’il en soit, le jeune Pierre de Dreux ne peut espérer hériter de son père qu’un patrimoine modeste, l’essentiel des terres familiales devant revenir à son frère aîné, le futur Robert III de Dreux. Pour échapper au destin peu enviable de cadet désargenté de famille noble, Pierre pouvait espérer être marié à une riche héritière. Pour cela il fallait que le roi de France le choisisse parmi des prétendants forcément toujours nombreux, et qu’une héritière soit « disponible ». Pierre, élevé à la cour de Philippe Auguste et dont le père avait toujours été d’une loyauté totale envers son royal cousin, pouvait espérer être choisi.
Alix de Bretagne.
Malheureusement pour lui, les riches héritières étaient déjà promises à d’autres. Alix de Bretagne (née en 1200) devait notamment épouser Henri de Penthièvre, issu de la branche des comtes de Bretagne, rivale de celle des ducs.
Sceau de la Duchesse Alix
Ce mariage aurait donc permis de réconcilier des lignages rivaux. Puis de rassembler leurs possessions. Augmentant ainsi la capacité des ducs à résister à leurs puissants voisins, et il avait la faveur des Bretons. Certes, pour Philippe Auguste, désireux de soumettre la Bretagne à son autorité. Après avoir contribué à la débarrasser de celles des rois d’Angleterre. Il aurait sans doute été préférable de fiancer immédiatement son héritière à Pierre. Mais à cette époque-là les Bretons ne l’auraient sans doute pas accepté, préfigurant de nouveaux troubles. Or, le roi d’Angleterre Jean Ier n’avait pas encore renoncé à prendre le contrôle du duché. D’autant qu’il détenait Aliénor de Bretagne aux prétentions supérieures à celles d’Alix.
Les Eudonides et Alain de Goëlo.
De plus, du côté de Philippe Auguste, il fallait récompenser le père d’Henri de Penthièvre, Alain de Goëlo, pour sa participation à la guerre contre Jean sans Terre en 1203, lui qui jusque-là avait toujours été fidèle aux rois d’Angleterre.
En 1209 une convention de mariage est donc établie à Paris à la cour royale entre les parents d’Alix (9 ans) et d’Henri (4 ans), l’Eudonide Alain de Goëlo et Guy de Thouars, dernier mari de la duchesse Constance, qui avait été nommé régent du duché peu après l’assassinat du duc Arthur Ier en 1203.
Mais, en cette même année 1209, les reliques de Saint Brieuc sont ramenées d’Angers au cours d’une cérémonie symbolique, présidée par Alain de Goëlo en personne. Ce geste est destiné à rappeler ses origines royales et sa légitimité à régner sur la Bretagne, au moins égale à celle des Capétiens à régner sur la France… On sait que le lignage des Eudonides n’avait jamais renoncé à restaurer la royauté bretonne dont le souvenir avait été entretenu. Voilà qui ne dut pas faire plaisir à Philippe Auguste s’il en fut informé, ce qui est probable.
Le contexte international.
Surtout, en 1212 le contexte international n’est plus le même qu’en 1209. En 1206, Jean Ier était revenu en France pour essayer de récupérer les possessions continentales anglaises perdues en 1203 et 1204, la Bretagne et la Normandie essentiellement. Cette tentative s’était soldée par un échec cuisant et, cette année-là, Philippe Auguste avait pris directement en main le gouvernement de la Bretagne.
Denier de Philippe Auguste PHILIPVS REX et DVX BRITANIE (1206)
Les Bretons n’ayant aucune envie de rejoindre le camp de Jean Ier, repoussé devant Nantes en septembre, le roi de France avait pu rendre le gouvernement du duché à Guy de Thouars en 1207.
Jean avait retiré de cette campagne l’enseignement qu’il ne pourrait atteindre son but qu’en réussissant à former une coalition suffisamment importante. Il s’était attelé à cette tâche au cours des années suivantes. Et était parvenu à rallier à lui son cousin germain l’empereur Othon de Brunswick. Ainsi que les comtes de Boulogne et de Flandres.
Pierre de Dreux.
Dans ce contexte inquiétant, le roi de France a besoin pour diriger la Bretagne d’un homme sûr. Et capable de lui fournir une aide militaire immédiate. Son parent Pierre de Dreux répond mieux à ces critères qu’Henri de Penthièvre. Encore enfant, et dont le père, Alain de Goëlo, désormais très âgé, avait peut-être dévoilé un peu trop tôt ses véritables intentions pour son fils, une fois celui-ci devenu duc.
En 1212, Philippe Auguste annonce qu’il porte son choix sur son parent Pierre de Dreux. Qui dès novembre, doit promettre de respecter toutes les promesses que Guy de Thouars et la noblesse bretonne avaient faites au roi de France. Le 27 janvier 1213 Pierre prête l’hommage lige au roi de France et épouse Alix, à Paris, en décembre.
L’anarchie sévie en Bretagne.
Mais dès le mois d’avril il participe à un conseil de guerre destiné à préparer la reprise des hostilités avec l’Angleterre. Et prend ses fonctions de duc en mai. Présent en Bretagne dès cette date, il doit trouver l’argent nécessaire à l’envoi d’un contingent breton destiné à combattre aux côtés de l’armée royale. Le 1er juin il remporte une victoire sur les Anglais près de Damme. Le choix de Pierre de Dreux comme mari de l’héritière du duché apparaît donc plus adapté aux circonstances. Mais Philippe Auguste ne s’est pas embarrassé des souhaits des Bretons.
Le pays est divisé.
Au moment où Pierre prend ses fonctions à la tête du duché, la Bretagne a sombré dans une profonde anarchie depuis plusieurs années. Presque partout l’autorité ducale a reculé au profit des principaux barons et des évêques. Tandis que la puissante maison de Penthièvre, contrôlant l’équivalent des Côtes d’Armor actuelles, n’attendait qu’une occasion de prendre sa revanche. Surtout après le désaveu que venait de lui infliger Philippe Auguste. A l’ouest du duché, les vicomtes de Léon étaient quasiment indépendants. Tandis que le mariage de Conan de Léon avec une sœur d’Alain de Goëlo avait allié deux familles traditionnellement hostiles au pouvoir ducal. Conan de Léon était d’ailleurs le tuteur d’Henri de Penthièvre et avait reçu de Philippe Auguste le bail de ses terres pendant sa minorité.
Les neuf évêchés bretons.
D’autre part les neufs évêques bretons défendaient jalousement les pouvoirs temporels considérables dont ils continuaient de bénéficier. En particulier l’évêque de Nantes qui se considérait comme le seigneur de la ville. Celui-ci refusait de reconnaître au duc de Bretagne (pourtant comte de Nantes), la possibilité d’exercer des pouvoirs régaliens sur les terres épiscopales. Contrairement à tout ce qui se passait dans le royaume de France. De plus, les cours de justice épiscopales étant considérées comme plus sûres, les justiciables y affluaient. Et donc les cours laïques étaient menacés de désertion.
Quant aux curés de paroisse, tout était pour eux l’occasion de s’enrichir sur le dos des fidèles. En particulier le « past nuptial » et le « tierçage ».
Mais avant de s’occuper des affaires bretonnes,
Pierre doit fournir au roi de France l’aide que ce dernier attend de lui face à Jean Ier (qui débarque à La Rochelle le 15 février 1214) et à ses alliés. Le 5 juin l’armée anglaise est devant Nantes où elle est repoussée. Le 19 elle entreprend le siège de la forteresse de La Roche aux Moines, près d’Angers.
Dernière édition par Admin le Jeu 18 Mai - 21:55, édité 1 fois
Re: Pierre Ier de Bretagne, un Capétien sur le trône ducal breton.
Ruines du château de la Roche aux Moines, Savennières (France 49). La tour restante s’est effondrée dans les années 1970.
Si Jean parvient à s’en emparer, de nombreux seigneurs de la région basculeront en sa faveur. Tandis que ses alliés sont en train d’attaquer la France par le Nord. Mais, le 2 juillet, le prince Louis, fils de Philippe Auguste, arrive avec Pierre Ier à la tête de 13000 hommes, comprenant un fort contingent de Bretons. Lâché par les barons poitevins juste avant le combat, pris de panique, Jean Ier quitte le champ de bataille précipitamment. Cette fuite l’empêche de rejoindre ses alliés à Bouvines, vaincus par Philippe Auguste le 27 juillet.
Pierre Ier, Capétien et véritable chef de la Bretagne.
Ainsi Jean Ier perd définitivement ses possessions au nord de la Loire. Et Pierre Ier peut retourner dans son duché auréolé du prestige d’avoir largement contribué à la victoire finale de Philippe Auguste sur ses ennemis.
Le moment est venu pour lui de profiter de son prestige pour devenir le chef véritable de la Bretagne. Il décide d’éliminer d’abord la menace représentée par la maison de Penthièvre.
Sceau de Pierre, DVCIS BRITANIE ET COMMITIS RICHMONTIS (duc de Bretagne et comte de Richmond). Le duc de Bretagne, armé de toutes pièces, portant au bras gauche un écu à ses armes : échiqueté d’or et d’azur qui est Dreux, au franc canton d’hermines qui est Bretagne (ces armes sont particulières à la branche de Bretagne de la maison de Dreux)
L’Historien breton Éric BORGNIS-DESBORDES nous avait fait le plaisir de nous passionner pour la vie étonnante d’un des grands souverains de Bretagne. Nous parlons du fameux Arthur Ier de Bretagne, qui a régné de 1187 à 1203.
Alors il nous amène cette fois-ci vers un Capétien, Pierre Ier de Bretagne, entre 1213 et 1237.
Découvrez son intéressant ouvrage Pierre Ier de Bretagne (1213-1237) – Pierre de Dreux, un Capétien sur le trône ducal. Aux Éditions Yoran Embanner (www.yoran-embanner.com).
A PROPOS DE L'AUTEUR
Éric BORGNIS DESBORDES
Je suis né en 1965 à Lannion, j'habite à Nantes, je suis professeur d'Histoire géographie, doctorant à l'Université de Bretagne Occidentale (Brest), membre du Centre de Recherche Bretonne et Celtique (CRBC) et auteur de : Arthur Ier (1187-1203), l'espoir breton assassiné, Yoran embanner (2012), prix Mocaër du livre d'Histoire de Bretagne 2013, Pierre Ier de Bretagne (1213-1237), un capétien sur le trône ducal , Yoran embanner (2013).
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