Louis-Marie Faudacq, le peintre douanier
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Louis-Marie Faudacq, le peintre douanier
Publié le 28 octobre 2018 à 09h00
Cet officier des douanes a documenté durant toute sa carrière la vie quotidienne de ses lieux d’affectation. De 1868 à 1916, Louis-Marie Faudacq a arpenté les Côtes-du-Nord, laissant derrière lui une œuvre prolifique et artistiquement riche. Méconnue de son vivant, cette dernière est redécouverte depuis une trentaine d’années.
Collection particulière/Jean-Claude Porée
Il y a eu le facteur Cheval, le douanier Rousseau… Moins connu, la Bretagne compte également son fonctionnaire artiste, en la personne de Louis-Marie Faudacq, lui aussi douanier de son état. Né le 19 mai 1840, Faudacq voit le jour à Givet dans les Ardennes, un peu par hasard, au gré des affectations paternelles. Car son père est douanier, comme son grand-père.
La famille trouve ses racines dans le Goëlo, où ce grand-père a été secrétaire de la mairie de Bréhat avant de devenir gabelou. La mère de Louis-Marie Faudacq, elle, est originaire de Paimpol. Le jeune homme suit la tradition familiale et s’engage à son tour dans l’administration douanière, en 1858, à l’âge de 18 ans.
Du Nord à la Bretagne
Nommé dans le Nord de la France, à Dunkerque, il travaille sur le littoral. Il est ensuite envoyé du côté de Lille, Maubeuge et Valenciennes. « Dès l’époque de sa première affectation dunkerquoise, le regard de Faudacq se porte sur la vie maritime des ports du Nord et du Pas-de-Calais, tout comme sur les campagnes et les bourgades de l’arrière-pays, à proximité de la frontière belge, le long de laquelle il effectue ses tournées, explique Denis-Michel Boëll, inspecteur des musées de France, dans un ouvrage consacré à l’artiste. Estacades et jetées de Dunkerque, pêcheurs de Boulogne, goélettes « islandaises » figurent parmi ses premiers sujets. […]
Les dessins de jeunesse, à la mine de plomb et au fusain, sont de facture assez classique, à la fois précis et appliqués, délicats mais statiques ». À côté de son travail, le jeune Faudacq qui se passionne, en effet, pour le dessin suit les cours de l’artiste Alfred-Charles Foulongne ; son style académique laisse déjà présager un talent particulier : « Dès cette époque, poursuit Denis-Michel Boëll, d’autres croquis exécutés plus rapidement témoignent d’une technique éprouvée : un dessin de 1864 montre par exemple un voilier échoué à l’île de Bréhat, dont les caractéristiques principales, ligne de coque, gréement, sont saisies au moyen de quelques coups de crayons nerveux et enlevés. Le trait va à l’essentiel. La précision des détails témoigne d’une réelle familiarité avec les bateaux, ou tout du moins d’un grand sens de l’observation ».
Cotres échoués et personnages débarquant. (Aquarelle de Louis-Marie Faudacq/Collection musée d'art et d'histoire - ville de Saint-Brieuc/ Inv. 2001.7.27)
Le jeune Faudacq profite, en effet, de ses congés annuels pour revenir en Bretagne, où son grand-père a fini sa carrière. Il parcourt la lande et le littoral, dessine d’abord le patrimoine local, lavoirs, calvaires et églises. « C’est sans doute en raison de la forte implantation familiale dans le Goëlo que Louis Faudacq demande une mutation en Bretagne », note l’historien Olivier Levasseur.
Le douanier quitte le Nord pour Cancale, où il est nommé receveur en février 1868. Quelques semaines plus tard, il reçoit une nouvelle affectation, Lézardrieux, où il restera une quinzaine d’années, avant de terminer sa carrière à quelques pas de là, à Tréguier, où il prend sa retraite le 1er juillet 1900 pour s’installer à Ploubazlanec.
Un attachement aux gens de la mer
« Paysagiste précoce, Faudacq devient un dessinateur prolixe à compter de sa nomination en Bretagne, à l’âge de 28 ans, poursuit Denis-Michel Boëll. Noircissant des centaines de feuilles, remplissant des dizaines de cahiers de croquis, il conjugue cette pratique artistique avec son métier de douanier… »
Tout au long de sa vie, Faudacq va profiter de ses rondes mais aussi de son temps libre pour dessiner et peindre la vie du littoral. Ses sujets de prédilection restent tournés vers la mer. Son œuvre est principalement composée de dessins de bateaux, des navires qui participent aux campagnes de pêche en Islande aux petites embarcations de cabotage de la région.
Il immortalise également les paysages et les scènes de la vie quotidienne du littoral, manœuvres de marins, embarcations échouées, pêcheurs à pied, goémonières et premières régates, avec l’apparition de la plaisance. Autant d’instants capturés qui font office de témoignages.
(Louis-Marie Faudacq. Collection musée d'art et d'histoire - ville de Saint-Brieuc/Inv. 2001.7.0241)
Faudacq se fait d’ailleurs connaître en publiant ses dessins dans des revues comme L’Illustration ou Le Yacht. C’est la seule reconnaissance qu’il rencontrera de son vivant. Il tente bien de faire valoir son talent artistique, mais son exposition au Salon des artistes français à Paris en 1879 ne rencontre pas le succès escompté. Qu’à cela ne tienne, il poursuit sa passion, jusqu’à sa mort, le 31 mai 1916. « Louis-Marie Faudacq est sans nul doute considéré par ses contemporains comme un original, un personnage étonnant qui arpente les grèves de jour comme de nuit et dessine sans répit », explique Olivier Levasseur. L’artiste solitaire est d’ailleurs affectueusement baptisé « Gobe la Lune » par les habitants du coin, qui le voient sortir avec son chevalet à la tombée de la nuit pour tenter de saisir cette lumière si particulière…
Un témoignage inestimable de la Bretagne
Durant plusieurs décennies, dans un relatif anonymat, Louis-Marie Faudacq n’aura de cesse de documenter la vie du littoral des Côtes-du-Nord à la fin du XIXe siècle. Un témoignage inestimable redécouvert il y a une trentaine d’années en Bretagne.
« Le travail artistique de Louis-Marie Faudacq fournit un matériau original important pour l’ethnographe et l’historien, explique l’ethnologue Guy Prigent. En effet, ses dessins, croquis et aquarelles relèvent d’un souci de précision sur les techniques artisanales de construction et d’entretien des navires, sur les pratiques de pêche côtière et d’estran (pêche à pied), sur les manœuvres de port et d’échouage… »
Certains de ses dessins apportent de nouvelles connaissances sur des types de voiliers de travail aujourd’hui disparus, à une époque où la photographie n’en est qu’à ses balbutiements. « Les postures, les attitudes, les vêtements, les outils des hommes et des femmes au travail renseignent le chercheur sur les conditions de vie sur un littoral encore sauvage », poursuit Guy Prigent. Car Faudacq est un témoin privilégié des bouleversements, notamment économiques, que connaît le littoral costarmoricain entre la fin du Second Empire et les débuts de la IIIe République. Au-delà de l’intérêt historique de son œuvre, le peintre breton reste un artiste à part entière, malheureusement méconnu.
Certes, il publie régulièrement ses créations dans L’Illustration et Le Yacht, mais il ne connaîtra jamais de son vivant la reconnaissance du milieu artistique. Dans les années 1930, le peintre Paul Signac collectionnera les œuvres de Faudacq, en tentant de faire connaître son travail, en vain. Il faudra attendre 2004 pour qu’une première exposition lui soit consacrée, et que le Musée d’art et d’histoire de Saint-Brieuc acquiert le fonds de l’artiste.
Pour en savoir plus« Faudacq », de Guy Prigent, Olivier Levasseur et Denis-Michel Boëll, éditions l’Apogée, 2003.
le telegramme 30.10.2018
Cet officier des douanes a documenté durant toute sa carrière la vie quotidienne de ses lieux d’affectation. De 1868 à 1916, Louis-Marie Faudacq a arpenté les Côtes-du-Nord, laissant derrière lui une œuvre prolifique et artistiquement riche. Méconnue de son vivant, cette dernière est redécouverte depuis une trentaine d’années.
Collection particulière/Jean-Claude Porée
Il y a eu le facteur Cheval, le douanier Rousseau… Moins connu, la Bretagne compte également son fonctionnaire artiste, en la personne de Louis-Marie Faudacq, lui aussi douanier de son état. Né le 19 mai 1840, Faudacq voit le jour à Givet dans les Ardennes, un peu par hasard, au gré des affectations paternelles. Car son père est douanier, comme son grand-père.
La famille trouve ses racines dans le Goëlo, où ce grand-père a été secrétaire de la mairie de Bréhat avant de devenir gabelou. La mère de Louis-Marie Faudacq, elle, est originaire de Paimpol. Le jeune homme suit la tradition familiale et s’engage à son tour dans l’administration douanière, en 1858, à l’âge de 18 ans.
Du Nord à la Bretagne
Nommé dans le Nord de la France, à Dunkerque, il travaille sur le littoral. Il est ensuite envoyé du côté de Lille, Maubeuge et Valenciennes. « Dès l’époque de sa première affectation dunkerquoise, le regard de Faudacq se porte sur la vie maritime des ports du Nord et du Pas-de-Calais, tout comme sur les campagnes et les bourgades de l’arrière-pays, à proximité de la frontière belge, le long de laquelle il effectue ses tournées, explique Denis-Michel Boëll, inspecteur des musées de France, dans un ouvrage consacré à l’artiste. Estacades et jetées de Dunkerque, pêcheurs de Boulogne, goélettes « islandaises » figurent parmi ses premiers sujets. […]
Les dessins de jeunesse, à la mine de plomb et au fusain, sont de facture assez classique, à la fois précis et appliqués, délicats mais statiques ». À côté de son travail, le jeune Faudacq qui se passionne, en effet, pour le dessin suit les cours de l’artiste Alfred-Charles Foulongne ; son style académique laisse déjà présager un talent particulier : « Dès cette époque, poursuit Denis-Michel Boëll, d’autres croquis exécutés plus rapidement témoignent d’une technique éprouvée : un dessin de 1864 montre par exemple un voilier échoué à l’île de Bréhat, dont les caractéristiques principales, ligne de coque, gréement, sont saisies au moyen de quelques coups de crayons nerveux et enlevés. Le trait va à l’essentiel. La précision des détails témoigne d’une réelle familiarité avec les bateaux, ou tout du moins d’un grand sens de l’observation ».
Cotres échoués et personnages débarquant. (Aquarelle de Louis-Marie Faudacq/Collection musée d'art et d'histoire - ville de Saint-Brieuc/ Inv. 2001.7.27)
Le jeune Faudacq profite, en effet, de ses congés annuels pour revenir en Bretagne, où son grand-père a fini sa carrière. Il parcourt la lande et le littoral, dessine d’abord le patrimoine local, lavoirs, calvaires et églises. « C’est sans doute en raison de la forte implantation familiale dans le Goëlo que Louis Faudacq demande une mutation en Bretagne », note l’historien Olivier Levasseur.
Le douanier quitte le Nord pour Cancale, où il est nommé receveur en février 1868. Quelques semaines plus tard, il reçoit une nouvelle affectation, Lézardrieux, où il restera une quinzaine d’années, avant de terminer sa carrière à quelques pas de là, à Tréguier, où il prend sa retraite le 1er juillet 1900 pour s’installer à Ploubazlanec.
Un attachement aux gens de la mer
« Paysagiste précoce, Faudacq devient un dessinateur prolixe à compter de sa nomination en Bretagne, à l’âge de 28 ans, poursuit Denis-Michel Boëll. Noircissant des centaines de feuilles, remplissant des dizaines de cahiers de croquis, il conjugue cette pratique artistique avec son métier de douanier… »
Tout au long de sa vie, Faudacq va profiter de ses rondes mais aussi de son temps libre pour dessiner et peindre la vie du littoral. Ses sujets de prédilection restent tournés vers la mer. Son œuvre est principalement composée de dessins de bateaux, des navires qui participent aux campagnes de pêche en Islande aux petites embarcations de cabotage de la région.
Il immortalise également les paysages et les scènes de la vie quotidienne du littoral, manœuvres de marins, embarcations échouées, pêcheurs à pied, goémonières et premières régates, avec l’apparition de la plaisance. Autant d’instants capturés qui font office de témoignages.
(Louis-Marie Faudacq. Collection musée d'art et d'histoire - ville de Saint-Brieuc/Inv. 2001.7.0241)
Faudacq se fait d’ailleurs connaître en publiant ses dessins dans des revues comme L’Illustration ou Le Yacht. C’est la seule reconnaissance qu’il rencontrera de son vivant. Il tente bien de faire valoir son talent artistique, mais son exposition au Salon des artistes français à Paris en 1879 ne rencontre pas le succès escompté. Qu’à cela ne tienne, il poursuit sa passion, jusqu’à sa mort, le 31 mai 1916. « Louis-Marie Faudacq est sans nul doute considéré par ses contemporains comme un original, un personnage étonnant qui arpente les grèves de jour comme de nuit et dessine sans répit », explique Olivier Levasseur. L’artiste solitaire est d’ailleurs affectueusement baptisé « Gobe la Lune » par les habitants du coin, qui le voient sortir avec son chevalet à la tombée de la nuit pour tenter de saisir cette lumière si particulière…
Un témoignage inestimable de la Bretagne
Durant plusieurs décennies, dans un relatif anonymat, Louis-Marie Faudacq n’aura de cesse de documenter la vie du littoral des Côtes-du-Nord à la fin du XIXe siècle. Un témoignage inestimable redécouvert il y a une trentaine d’années en Bretagne.
« Le travail artistique de Louis-Marie Faudacq fournit un matériau original important pour l’ethnographe et l’historien, explique l’ethnologue Guy Prigent. En effet, ses dessins, croquis et aquarelles relèvent d’un souci de précision sur les techniques artisanales de construction et d’entretien des navires, sur les pratiques de pêche côtière et d’estran (pêche à pied), sur les manœuvres de port et d’échouage… »
Certains de ses dessins apportent de nouvelles connaissances sur des types de voiliers de travail aujourd’hui disparus, à une époque où la photographie n’en est qu’à ses balbutiements. « Les postures, les attitudes, les vêtements, les outils des hommes et des femmes au travail renseignent le chercheur sur les conditions de vie sur un littoral encore sauvage », poursuit Guy Prigent. Car Faudacq est un témoin privilégié des bouleversements, notamment économiques, que connaît le littoral costarmoricain entre la fin du Second Empire et les débuts de la IIIe République. Au-delà de l’intérêt historique de son œuvre, le peintre breton reste un artiste à part entière, malheureusement méconnu.
Certes, il publie régulièrement ses créations dans L’Illustration et Le Yacht, mais il ne connaîtra jamais de son vivant la reconnaissance du milieu artistique. Dans les années 1930, le peintre Paul Signac collectionnera les œuvres de Faudacq, en tentant de faire connaître son travail, en vain. Il faudra attendre 2004 pour qu’une première exposition lui soit consacrée, et que le Musée d’art et d’histoire de Saint-Brieuc acquiert le fonds de l’artiste.
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