Curtis G. Culin, l'homme qui gagna la Bataille de Normandie ?

Son nom ne vous dit sûrement rien. Son invention, guère plus. Pourtant, son dispositif 'hedge-cutter', également connu sous le nom de 'coupeur de haies', va permettre aux blindés alliés, empêtrés dans les haies du bocage normand, de surclasser les forces allemandes lors de la bataille de Normandie. L'idée est toute simple : si les chars ne peuvent pas passer dans les haies, ni les contourner, pourquoi ne pas les couper ou les arracher en avançant ?

Depuis le débarquement du 6 juin 1944, les forces alliées veulent pénétrer vers l'intérieur des côtes françaises. Mais elles se heurtent au bocage normand, qui englobe la presqu'île du Cotentin, jusqu'à l'ouest de la ville d'Arromanches. Dans certaines régions, ce bocage s'étend sur près de 80 km ! Se succèdent devant les soldats et leurs blindés de grandes digues de terre qui montent jusqu'à près de 1,5 mètres, recouvertes de haies enchevêtrées, de buissons et d'arbres qui entourent de petits champs surélevés de taille irrégulière. Les haies sont robustes, avec des racines profondes, extrêmement difficiles à traverser. Les Alliés doivent utiliser les routes et chemins, étroits, que l'ennemi allemand visent particulièrement.


Le mouvement des blindés alliés est sévèrement restreint. Des embouteillages se forment même. Si à l'est, les Britanniques et les Canadiens sont bloqués par les troupes allemandes, les troupes américaines piétinent surtout, pendant plusieurs semaines, dans le bocage normand ! Chaque haie devient le prétexte à un combat acharné, la verdure favorisant la défense allemande. Ce bocage donne d'ailleurs son nom à la bataille des Haies ! Le terrain empêche le mouvements des chars, qui ont du mal à se mouvoir dans des chemins creux ou à franchir les hautes haies. Quand ils y arrivent, ils exposent directement leur point faible à l'ennemi : le dessous non protégé des blindés, que les armes antichars allemandes attaquent.

Curtis G. Culin est un sergeant du 102nd Cavalry Reconnaissance Squadron, une unité de reconnaissance de la 2nd Armored Division. Il se trouve en Normandie durant cette fameuse bataille des Haies. Après d'intenses réflexions, il va mettre au point un dispositif simple mais ingénieux, en utilisant le matériel qu'il a sous la main. Il va fixer, sur son propre char, des lames d'acier. Mais l'armée américaine n'a pas en quantité ce type de lames : Curtis se sert des hérissons tchèques, des dispositifs en poutrelles d'acier que les Allemands avaient disposés sur les plages normandes pour éviter le débarquement des péniches alliées.

Il découpe ces hérissons tchèques et prend plusieurs lames : le nombre peut varier même si en général, on dénombre 5 lames pour un char. Ces lames sont installées par Curtis sur la caisse de son blindé. Ce dispositif va lui permettre de franchir les haies ... en les tranchant à leur base, faisant une ouverture que l'infanterie pourra utiliser à sa suite, ainsi que d'autres véhicules légers. Les premiers tests, que le sous-officier présente à ses chefs de division, sont très concluants.

Le général Edward H. Brooks, chef de la 2nd Armored Division, invite le général Omar Bradley, à la tête de la First Army, qui se rend sur place le 15 juillet. Bluffé par la démonstration de Curtis et de son dispositif, il ordonne immédiatement que le plus grand nombre de chars possibles en soient équipés. Bradley veut ainsi que les blindés qui vont être déployés dans l'opération Cobra, une grande opération qui doit enfoncer les lignes de défense allemandes à la fin du même mois, en soient dotés.

Lors de la percée vers Saint-Lo, le 26 juillet 1944, les estimations font état de près de trois chars sur cinq équipés du hedge-cutter, le nom donné à l'invention de Curtis. Les chars qui en sont dotés sont eux surnommés rhino tanks, pour leur ressemblance avec la corne de l'animal ! Ce dispositif va permettre aux troupes américaines de retrouver une certaine mobilité en favorisant l'assaut entre infanterie, blindés et artillerie. Selon le général Omar Bradley, le hedge-cutter va sauver la vie de milliers de soldats américains et permettre la réussite de l'opération Cobra. Pour cette invention, Curtis recevra la Legion of Merit. Il fut gravement blessé quatre mois plus tard par une mine dans la forêt de Huertgen, mais va survivre à la guerre.

D'autres dispositifs équivalents furent créés ailleurs sur le front, dans un même but, notamment par des unités de blindés ou des unités de génie militaire : par explosif, par tuyaux, par butoirs faits en rails de voie ferrée ... Mais seul Curtis passa à la postérité !

Le 10 janvier 1961, Dwight Eisenhower, ancien chef des forces alliées en Europe et alors Président des États-Unis mentionna le sergent Culin et son invention lors d'une réunion avec l'American Society of Mechanical Engineers. L'homme et son dispositif, qui avait grandement contribué à gagner la Bataille de Normandie, devint célèbre !

Source : ww2today.com

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