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Antonin Carême, le premier chef cuisinier de l’histoire

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Antonin Carême, le premier chef cuisinier de l’histoire Empty Antonin Carême, le premier chef cuisinier de l’histoire

Message par Admin Sam 26 Mar - 16:47



Correspondance, Gautier DEMOUVEAUX

À l’occasion de la sortie de la nouvelle édition du Guide Michelin, l’édition du soir revient cette semaine sur cet art de vivre à la française qu’est la gastronomie. Pour ce quatrième épisode, retour sur la carrière incroyable d’Antonin Carême (1783-1833), le premier chef cuisinier de l’histoire, qui a concocté des menus pour les plus grands au début du XIXe siècle.

Surnommé « le chef des rois, le roi des chefs » de son vivant, Antonin Carême est le premier à user de ce titre prestigieux qui désigne le coordinateur en cuisine. Renommé dans l’Europe entière, cet artisan va faire entrer la cuisine au rang d’art, inventant par là-même la haute gastronomie française. Chose étonnante, il ne sera jamais restaurateur, alors même qu’il naît à Paris peu avant la Révolution, à une époque où les restaurants fleurissent dans la capitale

« En ce sens, Carême va à l’encontre de l’histoire de la cuisine, explique l’historien Antoine de Baecque dans son ouvrage La France gastronome. Le restaurant, il le juge mesquin et médiocre ; ne lui offrant pas, en tous les cas, la possibilité luxueuse de déployer le faste culinaire dont il a le talent… Mais ce faisant, Carême regarde moins vers le passé des princes privilégiés que vers l’avenir des « chefs », ceux qui sauront, en concluant une alliance avec les immenses ressources du capitalisme triomphant, forger l’outil mégalomane dont ils ont besoin pour étaler leur table dans les palaces, ces bateaux-phares de la grande cuisine réjouissant à la fois les têtes couronnées, l’internationale des puissants et les élites bourgeoises. »

Impossible donc de ne pas évoquer ce personnage atypique, qui marque encore aujourd’hui de son empreinte notre culture culinaire, et à qui l’on doit notamment les petits fours, l’éclair au chocolat, la charlotte aux fraises ou encore le tournedos Rossini…

Un cuisinier autodidacte

Antonin Carême voit le jour dans une famille nombreuse et pauvre, dans un quartier des faubourgs de Paris. À la mort de sa mère, son père l’emmène dîner dans une taverne, en bordure de Paris. À la fin du repas, après avoir payé l’addition, il le laisse avec quelques sous en poches et ces mots : « Va, petit. Dans le monde il y a de bons métiers, laisse-nous languir, la misère est notre lot, nous devons y mourir. Ce temps-ci est celui des belles fortunes. Il suffit d’avoir de l’esprit pour en faire une, et tu en as. Va petit, il se peut que ce soir ou demain, quelque bonne maison s’ouvrira à toi… »

Incapable de nourrir toute sa marmaille, son paternel, conscient du potentiel et de la vivacité d’esprit de son fils âgé d’une dizaine d’années seulement, l’abandonne. Le gamin, plein de ressources, trouve un emploi de garçon de cuisine chez un cabaretier, en échange de gîte et du couvert.

Après quelques années à faire la plonge, à éplucher les légumes et écailler les poissons, Antonin, 16 ans, est embauché comme marmiton chez le pâtissier Bailly, l’une des maisons les plus réputées de Paris. Ses aptitudes et son coup de main sont vite remarqués, au point qu’en un mois, il est nommé premier tourier, en charge de la réalisation de la pâte feuilletée. Sous les ordres de Jean Avice, qui réalise des commandes pour le ministère des Affaires extérieures, Antonin Carême se retrouve à réaliser des « extraordinaires », des commandes spécifiques pour des réceptions et des repas organisés par l’institution. C’est ainsi qu’il côtoie d’autres cuisiniers et qu’il apprend, notant tout dans des carnets le soir venu.

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Après avoir fait ses gammes chez le pâtissier Bailly, Antonin Carême ouvre sa propre enseigne en 1813. Sa boutique attire le tout-Paris, qui vient admirer ses œuvres. Mais le cuisinier abandonnera bien vite son commerce pour travailler pour se consacrer à ses clients fortunés. (Illustration : Ben – Desrez / Wikicommons)

La gastronomie diplomatique

Bourreau de travail, Antonin Carême fait ses gammes le jour et s’instruit le soir venu. Il apprend à lire et à écrire puis passe tout son temps libre à la bibliothèque nationale, où il dévore les traités d’architecture, sa passion. Il étudie les proportions, les perspectives, les forces et les portées, et peut reproduire pendant des heures des croquis d’édifices modernes ou antiques, dont il s’inspire ensuite pour réaliser des pièces montées, faites de choux à la crème, de sucre filé et de pâte d’amande.

« Il y a chez lui une permanente interaction entre l’architecture et la pâtisserie, explique l’historienne Marie-Pierre Rey, autrice d’une biographie sur ce personnage intitulée Le premier des chefs. L’exceptionnel destin d’Antonin Carême (paru chez Flammarion novembre 2021), dans l’émission Sans oser le demander sur France Culture, en 2021. Il est obsédé par l’élégance, la symétrie, les proportions, le néo-classique qui est à la mode sous le Premier Empire. Il a le souci de calibrer ses pièces montées. Pour lui, le visuel fait autant partie du plaisir de la cuisine que le goût… »

Ses réalisations ne passent pas inaperçues, au point de taper dans l’œil de Talleyrand, le Ministre des Relations extérieures. Ce dernier vient de recevoir pour mission de développer une « gastronomie diplomatique » de la part de Napoléon. Si l’empereur est indifférent à la bonne chère, il a compris l’importance des relations sociales dans le monde de la diplomatie. Pour cela, il pousse son ministre à acheter le château de Valençay dans l’Indre, pour recevoir comme il se doit les diplomates et les souverains étrangers. Talleyrand met alors le jeune Carême, âgé de 20 ans, au défi : il lui demande d’imaginer un an de menus variés. Le jeune cuisinier s’exécute et réussi son test avec brio. Le voilà au service de la France pour plus d’une dizaine d’années.

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Antonin Carême se fait connaître pour ses pièces montées impressionnantes, inspirées des principes d’architecture, élaborées avec des meringues, des choux, de la pâte d’amande et du sucre filé. (Illustration : Antonin Carême / domaine public)

Une reconnaissance internationale

L’apothéose de son travail se déroule lors du congrès de Vienne, après la défaite de Napoléon à Waterloo, en 1815. Talleyrand, qui représente les intérêts français à la demande du nouveau souverain Louis XVIII, emmène dans ses bagages son protégé, qui va régaler les papilles des cours européennes et adoucir ainsi, un peu, le sort du pays. Ce festival de réceptions fait d’Antonin Carême la coqueluche des grands de ce monde.

Ainsi, il cuisine tour à tour pour le tsar de Russie à la cour de Saint-Pétersbourg, mais aussi à Vienne en Autriche, où il travaille pour l’empereur Maximilien et pour Lord Steward, ambassadeur d’Angleterre. Puis, direction Londres, pour servir le régent de la couronne britannique et futur Georges IV. Auprès de ce dernier, il développe une cuisine plus diététique afin de soulager le souverain qui souffre de crise de goutte.

« Antonin Carême considère que la gastronomie n’est pas de la gloutonnerie, poursuit Marie-Pierre Rey. Il est un adepte d’une cuisine plus allégée que celle de ses contemporains, moins riche en viande dont les cuissons lentes se font à base de vin. Il préfère les cuissons plus courtes où le produit reste plus naturel. Il cuisine aussi beaucoup plus de poissons qu’un certain nombre de ses prédécesseurs. En cela, il est attaché à cette idée qu’une bonne cuisine peut être un gage de vie plus longue. Dans ce sens, c’est un pionnier… »

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Embauché par Talleyrand, Antonin Carême exerce tout son art dans les cuisines du château de Valençay, là où le ministre des Relations extérieures de Napoléon reçoit les plus grands dignitaires étrangers. (Photo : Zairon / Wikicommons)

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Au congrès de Vienne, Talleyrand, émissaire du nouveau souverain français Louis XVIII, se retrouve de manière inespérée à la table des négociations, après la défaite de Napoléon. Il emmène dans ses bagages Antonin Carême, pour que ce dernier mette sur pied de somptueux repas, afin d’influer – indirectement – sur le sort de la France. C’est la diplomatie gastronomique. Et cela fonctionne ! (Illustration : RMN / domaine public)

L’inventeur de la toque

De retour en France en 1826, Antonin Carême finit sa carrière au service du banquier James de Rothschild. Il décède sept ans plus tard, à l’âge de 49 ans, sans doute à cause des nombreuses fumées toxiques qu’il a inhalé dans les cuisines au cours de sa vie ; il avait l’habitude de cuisiner au charbon de bois.

S’il est aujourd’hui oublié du grand public, son héritage est encore très présent dans le monde de la cuisine aujourd’hui. Par ses plats, mais pas seulement : véritable chef d’orchestre qui dirige plus d’une cinquantaine de commis en cuisine, il est le premier à revendiquer l’appellation de « chef »

C’est à lui qu’on doit également l’un des accessoires emblématiques de la panoplie du parfait cuisinier : la toque. Avant Antonin Carême, le personnel œuvrant dans les cuisines de l’Ancien Régime portait un bonnet en coton. Selon l’intéressé, ce dernier faisait penser à celui des malades dans les hospices. « Un cuisinier devait annoncer l’homme en bonne santé, tandis que notre bonnet ordinaire nous rapprochait beaucoup trop de l’état de convalescence », rapporte-t-il dans ses mémoires. C’est pourquoi il garnit son chapeau d’un rond de carton, permettant ainsi de surélever le tissu et de dissiper la chaleur de la tête plus rapidement ; un souci d’hygiène mais aussi de prestige. Depuis, la toque est devenue le symbole d’excellence de toute une profession, elle est encore aujourd’hui arborée par tous les plus grands cuisiniers.

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Antonin Carême impose l’usage de la toque en cuisine, pour remplacer le bonnet traditionnellement utilisé en cuisine sous l’Ancien Régime. Une question d’hygiène mais aussi de prestige : plus la toque est haute, plus le cuisinier est important. (Illustration : Antonin Carême / domaine Public)

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Référence pour la profession, Antonin Carême a droit aux honneurs de l’Académie culinaire de France. La médaille de l’institution, remise à chacun de ses membres, porte l’effigie du premier chef cuisinier de l’histoire. (illustration : Académie culinaire de France / Wikicommons)

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