Les touristes sont-ils indispensables aux commerces locaux ?

Rugles attire de nombreux touristes toute l'année, notamment grâce à son aire gratuite pour les camping-cars. Globalement, les commerçants sont satisfaits de cet équipement qui a un impact sur leur chiffre d'affaires.

28/07/2016 à 08:27 par Raphaël Hudry



En juin dernier, Jean-Louis Lorion, boulanger, et Olivier Dupont, gérant du So’Café, respectivement président et vice-président de l’Union commerciale de Rugles, vantaient les mérites de l’aire de camping-car gratuite qui « apporte pas mal de touristes qui ne vont pas au supermarché ». A la moitié de la saison touristique estivale, Le Réveil a sondé les autres commerces ruglois.

Les professionnels interrogés reconnaissent presque tous l’atout indéniable de l’aire de stationnement qui attire les touristes. Anglais, Allemands, Hollandais, Belges mais aussi Français sont ainsi souvent de passage. Comme le fait très justement remarquer Nathalie De Wever, du traiteur Goût et Tradition, qui servait d’ailleurs des Américains la veille de notre interview, les touristes étrangers qui passent à Rugles ne sont pas forcément camping-caristes. Pourtant, plusieurs commerçants en sont persuadés, voire ont discuté avec les touristes pour savoir comment ils étaient venus.

« L’aire a un bon impact, car les touristes vont dans le centre », assure ainsi Elisabeth Honrado, gérante du bar de l’Etoile. « Cela ne peut pas être un point négatif, acquiescent Maryna et Jérémy Dumont, de la boulangerie du même nom. L’été, les touristes permettent de maintenir le chiffre, ils sont complémentaires. » « Ce sont des gens de passage mais il y a aussi quelques habitués, ils remplacent les clients locaux qui partent en vacances », ajoute Eric D’Agostino de la pizzeria Dolce Vita.


Pas touche à la gratuité

Celui qui en parle le mieux, c’est le boucher Stéphane Prevost.

« Certains estiment que, comme l’aire est gratuite, ils font marcher le commerce local, estime-t-il. Un jour j’ai compté 14 camping-cars et le lendemain j’en ai servi cinq. Ils ne viennent pas forcément que l’été, mais plutôt pendant l’arrière-saison entre avril et juin et à l’automne. Si l’aire n’était pas gratuite, certains camping-caristes ne viendraient pas : des gens de Dieppe allaient près de Rouen, et quand c’est devenu payant là-bas, ils sont venus à Rugles. »


Et si on peut penser que les camping-cars profitent plus aux commerces de bouche, ce n’est en fait pas seulement le cas. « Cela nous arrive d’avoir des clients camping-caristes, témoigne ainsi Pascal Pivain, de Luxoflor. J’en vois chercher leur pain, s’installer en terrasse ou aller chez le boucher… Je suis surpris d’en voir même en hiver. Je suis un fervent défenseur de l’aire de camping-car. »


« C’est triste de voir des commerces vides »


Vendredi dernier, il y avait quelques camping-cars stationnés. Dans l’un d’eux, Toby Taylor, touriste britannique originaire d’Ashford, dans le sud est de l’Angleterre. Il a trouvé l’aire de Rugles dans un livre spécialisé et a décidé d’y faire une étape. C’est la première fois qu’il visitait la région et était en direction du centre-ville pour y faire des achats. « Nous n’avons pas d’aires de camping-car gratuites comme en France », indique-t-il.

Stationnés juste en face, Paul et Liz, eux, reviennent du centre-ville où ils ont notamment acheté des produits contre les moustiques. Egalement britanniques, provenant du sud du Pays de Galles, ils ont aussi trouvé l’aire rugloise dans un livret réservé aux camping-caristes.

« Tout ce qui attire des touristes, c’est une bonne chose, louent-ils. Vous proposez de l’électricité et de l’eau, et les gens viennent et dépensent sur place. C’est juste triste de voir tellement de commerces vides… »

Ces voyageurs chevronnés étaient de passage pour la première fois, et envisageaient de rester deux nuits dans cette « ville attractive ». C’est toujours bon à prendre.


Et les parisiens ?

Le président de l’Union commerciale indiquait le mois dernier que les Parisiens étaient également complémentaires à la clientèle locale « Nous sommes contents qu’ils arrivent le vendredi soir », reconnaissait-il. « Un week-end sans eux, c’est 40 % de chiffre d’affaires en moins », lance ainsi Stéphane Prevost, le boucher, tout en préparant une commande pour… un Parisien.

« Nous avons pas mal de parisiens, peut-être plus que des touristes, le week-end et à partir de Pâques, estime Nathalie De Wever, la traiteur de Goût et Tradition. Ils remplacent la clientèle locale et se promènent beaucoup en ville. Pourtant, nous faisons des produits locaux, mais c’est peut-être un peu trop cher pour les étrangers. »

« Les touristes étrangers n’ont pas un gros impact sur notre chiffre, nous avons plutôt une clientèle parisienne, surtout le week-end et en hiver », ajoutent Guy et Jeanine, du tabac-loto-presse. Ces derniers notent toutefois une certaine baisse de fréquentation de cette clientèle. « Nous manquons de gîtes et de restaurants pour les Parisiens », estime Stéphane Prevost.

Raphaël Hudry


http://www.lereveilnormand.fr/2016/07/28/les-touristes-sont-ils-indispensables-aux-commerces-locaux/