Le déclin des abeilles se poursuit en France
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Le déclin des abeilles se poursuit en France
Publié le 21/10/2017 à 17:45
Gérard Le Puill
Humanite.fr
Un apiculteur correzien voit le métier se précariser de plus en plus avec un revenu qui décline. Photo : Fred Tanneau/AFP
Comme en 2016, la récolte de miel en France sera cette année inférieure à 10 000 tonnes alors que notre pays en importe plus de 30 000 par an. Au delà de l’exposition des insectes pollinisateurs aux conséquences de l’utilisation aux néonicotinoïdes qui augmentent leur taux de mortalité, le réchauffement climatique perturbe de plus en plus les butineuses entre les floraisons précoces, les gelées tardives du printemps, les sécheresses provoquées par la canicule qui conduisent à une dégradation rapide des plantes et des fleurs porteuses de nectar.
Décidément, le réchauffement climatique ne favorise pas la biodiversité. Avec des hivers de plus en plus doux, les abeilles sortent de la ruche de plus en plus tôt dans l’année tandis que les reines pondent de plus en plus d’œufs pour renouveler les colonies. On pourrait croire que cela crée des conditions favorables pour produire davantage de miel en France. Sauf que les butineuses ne récoltent pas grand-chose en début d’année alors que l’essaim doit se nourrir pour travailler au lieu d’hiberner plus longtemps. Quand des gelées tardives viennent ensuite détruire des quantités de fleurs normalement disponibles, la nourriture se raréfie au moment où il faudrait butiner davantage.
Apiculteur en Languedoc, Henri Clément, secrétaire général et porte-parole de l’Union nationale de l’apiculture française, observe cela depuis des années et constate que 2017, en dépit du beau temps, a été une très mauvaise année pour les abeilles, qu’elles aient jeté leur dévolu sur les fleurs sauvages ou sur les cultures comme le colza au printemps, ou le tournesol en été. Ces plantes sont traitées aux néonicotinoïdes, afin de protéger les cultures contre les ravageurs et diverses maladies. Mais on sait que ces produits de traitement augmentent le taux de mortalité de tous les insectes pollinisateurs. Selon Henri Clément, la récolte de miel de colza a été faible au printemps, tout comme celle du miel de tournesol en été. Cette année, la récolte sur les fleurs de romarin n’a pas été meilleure et celles issue de la floraison de l’acacia a été réduite à peu de chose en raison des gelées tardives. Celle issue des châtaigniers a été correcte sans être mirobolante.
De 50 kilos à 12 kilos de miel par ruche et par an
En vingt ans, cet apiculteur observe que l’on est passé d’une récolte de 50 kilos de miel par ruche et par an à une douzaine de kilos. « Le bouleversement climatique est bien là et il rend plus difficiles les conditions de vie des abeilles. Elles ont de plus en plus de mal à trouver des ressources. Cette année j’ai vu que les abeilles avaient faim en juillet sans rien pouvoir ramener à la ruche », observe Henri Clément.
Apiculteur en Corrèze après avoir quitté la Vendée pour fuir les pesticides, Yves Delaunay fait des observations similaires. « En raison de la douceur des hivers, les abeilles consomment davantage de miel sur leur réserve hivernale. Le printemps précoce accélère les floraisons qui se suivent très vite et durent moins longtemps globalement. Et puis, quand il n’y a plus de floraison, la colonie périclite », explique ce professionnel qui voit le métier d’apiculteur se précariser de plus en plus avec un revenu qui décline.
Des prix tirés vers le bas par la mondialisation
Nous touchons ici du doigt une conséquence trop mal connue de la mondialisation capitaliste de l’économie. Les plus gros volumes de miel importés par la France et les autres pays de l’Union européenne proviennent de Chine, d’Ukraine et d’Argentine à des prix défiant toute concurrence. Et pour cause : beaucoup de ces miels ont été « retravaillés » avant leur conditionnement avec des ajouts de sirop de sucre. C’est souvent le cas des miels dits de « premier prix », selon des tests réalisés en 2014 par l’UFC-Que Choisir. Ajoutons que la Commission européenne ne fait pas ce qu’il faut pour favoriser la transparence. Certes, les textes européens prévoient l’obligation de mentionner le pays d’origine sur l’étiquette d’un pot de miel. Mais cette obligation tombe en cas de pluralité des origines. On applique alors la mention opaque ainsi rédigée : « mélange de miels originaires/ non originaire de l’Union européenne». Voilà comment l’Europe utilise les miels chinois, argentins ou ukrainiens pour mettre sur le marché des mélanges de premier prix afin de faire baisser via une simple comparaison des étiquettes le prix de vente des produits de qualité.
Le déclin des insectes pollinisateurs devait sonner comme un signal d’alarme dans les 28 pays de l’Union européenne qui négocient actuellement sur des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre dans les quatre grands secteurs que sont l’industrie, le bâtiment, les transports et l’agriculture. Mais, dans ce secteur, l’Europe a autorisé le 27 juillet 2015 un néocotinoïde mis au point par Dow Agro Science pour le traitement des plantes, lesquelles absorberont cette molécule dont l’EFSA, a qualifié de « hautement toxique pour les abeilles ».
- Des associations demandent aux ministres de l'écologie et de l'agriculture la suppression du Sulfoxaflor https://presse.lpo.fr/?m=32&p=view&pi=ViewBrowserPlugin&uid=b6f1af08dbf0314105bfcd3ff7776581
Gérard Le Puill
Journaliste et auteur
Gérard Le Puill
Humanite.fr
Un apiculteur correzien voit le métier se précariser de plus en plus avec un revenu qui décline. Photo : Fred Tanneau/AFP
Comme en 2016, la récolte de miel en France sera cette année inférieure à 10 000 tonnes alors que notre pays en importe plus de 30 000 par an. Au delà de l’exposition des insectes pollinisateurs aux conséquences de l’utilisation aux néonicotinoïdes qui augmentent leur taux de mortalité, le réchauffement climatique perturbe de plus en plus les butineuses entre les floraisons précoces, les gelées tardives du printemps, les sécheresses provoquées par la canicule qui conduisent à une dégradation rapide des plantes et des fleurs porteuses de nectar.
Décidément, le réchauffement climatique ne favorise pas la biodiversité. Avec des hivers de plus en plus doux, les abeilles sortent de la ruche de plus en plus tôt dans l’année tandis que les reines pondent de plus en plus d’œufs pour renouveler les colonies. On pourrait croire que cela crée des conditions favorables pour produire davantage de miel en France. Sauf que les butineuses ne récoltent pas grand-chose en début d’année alors que l’essaim doit se nourrir pour travailler au lieu d’hiberner plus longtemps. Quand des gelées tardives viennent ensuite détruire des quantités de fleurs normalement disponibles, la nourriture se raréfie au moment où il faudrait butiner davantage.
Apiculteur en Languedoc, Henri Clément, secrétaire général et porte-parole de l’Union nationale de l’apiculture française, observe cela depuis des années et constate que 2017, en dépit du beau temps, a été une très mauvaise année pour les abeilles, qu’elles aient jeté leur dévolu sur les fleurs sauvages ou sur les cultures comme le colza au printemps, ou le tournesol en été. Ces plantes sont traitées aux néonicotinoïdes, afin de protéger les cultures contre les ravageurs et diverses maladies. Mais on sait que ces produits de traitement augmentent le taux de mortalité de tous les insectes pollinisateurs. Selon Henri Clément, la récolte de miel de colza a été faible au printemps, tout comme celle du miel de tournesol en été. Cette année, la récolte sur les fleurs de romarin n’a pas été meilleure et celles issue de la floraison de l’acacia a été réduite à peu de chose en raison des gelées tardives. Celle issue des châtaigniers a été correcte sans être mirobolante.
De 50 kilos à 12 kilos de miel par ruche et par an
En vingt ans, cet apiculteur observe que l’on est passé d’une récolte de 50 kilos de miel par ruche et par an à une douzaine de kilos. « Le bouleversement climatique est bien là et il rend plus difficiles les conditions de vie des abeilles. Elles ont de plus en plus de mal à trouver des ressources. Cette année j’ai vu que les abeilles avaient faim en juillet sans rien pouvoir ramener à la ruche », observe Henri Clément.
Apiculteur en Corrèze après avoir quitté la Vendée pour fuir les pesticides, Yves Delaunay fait des observations similaires. « En raison de la douceur des hivers, les abeilles consomment davantage de miel sur leur réserve hivernale. Le printemps précoce accélère les floraisons qui se suivent très vite et durent moins longtemps globalement. Et puis, quand il n’y a plus de floraison, la colonie périclite », explique ce professionnel qui voit le métier d’apiculteur se précariser de plus en plus avec un revenu qui décline.
Des prix tirés vers le bas par la mondialisation
Nous touchons ici du doigt une conséquence trop mal connue de la mondialisation capitaliste de l’économie. Les plus gros volumes de miel importés par la France et les autres pays de l’Union européenne proviennent de Chine, d’Ukraine et d’Argentine à des prix défiant toute concurrence. Et pour cause : beaucoup de ces miels ont été « retravaillés » avant leur conditionnement avec des ajouts de sirop de sucre. C’est souvent le cas des miels dits de « premier prix », selon des tests réalisés en 2014 par l’UFC-Que Choisir. Ajoutons que la Commission européenne ne fait pas ce qu’il faut pour favoriser la transparence. Certes, les textes européens prévoient l’obligation de mentionner le pays d’origine sur l’étiquette d’un pot de miel. Mais cette obligation tombe en cas de pluralité des origines. On applique alors la mention opaque ainsi rédigée : « mélange de miels originaires/ non originaire de l’Union européenne». Voilà comment l’Europe utilise les miels chinois, argentins ou ukrainiens pour mettre sur le marché des mélanges de premier prix afin de faire baisser via une simple comparaison des étiquettes le prix de vente des produits de qualité.
Le déclin des insectes pollinisateurs devait sonner comme un signal d’alarme dans les 28 pays de l’Union européenne qui négocient actuellement sur des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre dans les quatre grands secteurs que sont l’industrie, le bâtiment, les transports et l’agriculture. Mais, dans ce secteur, l’Europe a autorisé le 27 juillet 2015 un néocotinoïde mis au point par Dow Agro Science pour le traitement des plantes, lesquelles absorberont cette molécule dont l’EFSA, a qualifié de « hautement toxique pour les abeilles ».
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Gérard Le Puill
Journaliste et auteur
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