Tout ce que vous êtes prêts à faire pour obtenir un appartement
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Tout ce que vous êtes prêts à faire pour obtenir un appartement
Par Louise Auvitu
Publié le 12 février 2018 à 12h04
« "Je vais encore devoir magouiller. Ça me dégoûte." »
Tous les jours depuis trois mois, c’est devenu une routine. Arthur*, 27 ans, fouille les limbes d’internet pour dénicher des annonces d’appartements, envoie un mail-type avec en pièce jointe son dossier de 50 pages, mais rien ne se passe. Au mieux, on lui répond que "son profil ne convient pas". Au pire, sa candidature n’est même pas examinée.
« "Trouver un toit, ça a toujours été une galère sans nom pour moi. Etudiant, je n’avais pas de garants. J’ai dû bidouiller mon job chez Ikea pour que ça passe. Quand j’ai commencé à bosser, je me suis dit que ça serait plus simple. En fait, c’est pire." »
Depuis six ans, Arthur travaille. Sa copine aussi. A deux, ils touchent en moyenne 3.400 euros. Des revenus corrects qui pourraient leur permettre de trouver le logement à 1.000 euros auquel ils aspirent.
« "Le souci, c’est que l’un comme l’autre on dépend du régime des intermittents du spectacle. Peu importe nos revenus ou le fait que nous travaillons comme des acharnés, nous ne sommes pas en CDI. Et ça, c’est rédhibitoire. Là, on est au pied du mur. Je suis prêt à tout pour trouver un appart." »
Tricher, mentir, falsifier des documents dans l’espoir de pouvoir louer enfin un appartement, de nombreux Français ont un jour envisager de prendre ce risque. Arthur et d’autres ont franchi la limite. Jusqu’où sont-ils allés ? Ils nous racontent.
"J’ai dû passer un entretien d’embauche"
Son diplôme de journaliste en poche, Caroline, 25 ans, a voulu s’installer à Paris pour trouver un travail.
« "Tous les jours, je regardais les annonces, je visitais des appartements miteux et je déposais mon dossier dès que le logement était à peu près correct. En attendant, je n’avais pas d’autres choix que de faire la tournée des canapés de mes amis." »
Alors que Caroline galère, un de ses amis, qui se trouve plus ou moins dans la même situation, déniche la perle rare en seulement quinze jours. Sa technique : créer de toute pièce un CDI à 3.000 euros sur Photoshop. "Je ne voulais pas en arriver là. J’étais persuadée qu’avec de la persévérance et de la bonne volonté, ça allait bien finir pas marcher", souligne la jeune femme.
Mais les mois passent et elle cesse de compter le nombre de logements qui défilent sous son nez.
« "J’ai fini par me faire une raison. Sans garants, sans CDI, je n’avais aucune chance. Alors, je me suis emparée de mon ancienne carte étudiante, et j’ai falsifié la date." »
C’est bien connu, les propriétaires préfèrent les étudiants aux jeunes actifs. Et puis un jour, la roue tourne : après une énième visite qui se solde par refus, un agent immobilier appelle Caroline pour lui proposer une visite. L’annonce n’est pas encore en ligne, elle a 10 minutes pour venir.
« "Je crois qu’elle a eu pitié de moi. Il se trouve que l’appartement répondait à toutes mes attentes. Je le voulais, mais il fallait convaincre la propriétaire avant. Ce que je n’avais pas prévu, c’est que j’allais passer un entretien d’embauche." »
Caroline répète son rôle d’étudiante-en-stage-bientôt-diplômée. Au grand oral, elle reste vague et évoque à demi-mot qu’elle souhaite devenir journaliste, préférant élargir à une "possible carrière dans la communication".
« "J’étais plus stressée pour cet entretien que par les concours et examens que j’avais pu passer avant. Au final, j’ai eu l’appartement. J’y vis encore et je n’ai jamais eu le moindre souci pour payer mon loyer.
Paradoxalement, j'ai trouvé un boulot plus facilement qu'un appart... dans un secteur pourtant assez bouché." »
"Officiellement, je suis en coloc’ avec ma mère"
La liste des documents exigéshttps://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do;jsessionid=D39026FB28925235BF9D888EFDDDBA07.tpdila17v_3?cidTexte=JORFTEXT000031444493&dateTexte=&oldAction=rechJO&categorieLien=id&idJO=JORFCONT000031443881 par un bailleur est réglée comme du papier à musique : une pièce d’identité, un justificatif de domicile, un ou plusieurs documents attestant d’une activité professionnelle, les trois derniers bulletins de salaire et la dernière feuille d’imposition.
A cela s’ajoute des critères draconiens : gagner trois fois le loyer, avoir un CDI et parfois des garants. De part son métier d’agent immobilier, Mehdi a souvent eu entre les mains des dossiers falsifiés.
« "On les repère parce que les documents sont mal photoshoppés, que la période d’ancienneté varie selon les papiers, tout comme l’avis d’imposition. Quand ça arrive, nous nous contentons d’écarter le dossier. Si nous ne le faisons pas, le propriétaire peut se retourner contre nous." »
Mehdi reconnaît que parfois il "pousse" un dossier, même si tous les critères ne sont pas remplis.
« "Il arrive que les propriétaires soient moins exigeants, plus compréhensifs. Le souci, c’est que près de 70% d’entre eux font appel à une assurance loyers impayés. https://votreargent.lexpress.fr/immobilier/loyers-impayes-une-vraie-galere-pour-les-proprietaires_1606216.html C’est alors l’assurance qui choisit le candidat. L’aspect humain n’a alors aucune valeur. Il faut juste rentrer dans des cases, si ce n’est pas le cas, c’est foutu." »
En CDD, Flavie ne rentrait pas dans aucune case.
« "Je venais de décrocher un poste dans un hôpital psychiatrique de Lyon. J’étais fière d’y être arrivée, mais ma recherche d’appartement était un tel fiasco que j’ai commencé à me remettre en question. C’est comme si tout ce que j’avais accompli n’avait aucune valeur." »
Trop honnête, Flavie se refuse à falsifier son dossier. Au lieu de cela, elle trouve un compromis : sa mère sera elle aussi sur le bail.
« "L’agent immobilier savait très bien qu’il s’agissait d’une fausse ‘colocation’. Quelle hypocrisie ! Je ne regrette pas de l’avoir fait, mais je trouve ça triste d’être résumée à un nombre sur une fiche de paie. On est juste des papiers." »
"J’ai omis de parler de mon mari sans emploi"
Léa, elle, n’a pas à proprement parler triché. En 2016, cette auxiliaire en puéricultrice de 28 ans décide de se rapprocher de la capitale pour son travail. Mariée, en CDI, avec un salaire correct… Sur le papier, la jeune femme a plutôt un bon profil.
Pourtant, pendant près de six mois, elle essuie refus sur refus sans qu’on lui fournisse la moindre explication.
« "Un jour, un agent immobilier m’a fait entendre que mon dossier aurait plus de chance si je prenais l’appartement seule. Parce que mon mari était à la recherche d’un emploi, nous n’étions pas suffisamment fiables." »
Dès cet instant, Léa joue le jeu et enchaîne les visites sans jamais mentionner le fait qu’elle est mariée. Qu’importe l’alliance qu’elle porte à l’annulaire gauche.
« "A partir du moment où j’ai omis de parler de mon mari, nous n’avons eu que l’embarras du choix. J’ai signé le bail seule. Puis, l’air de rien, j’ai demandé par la suite qu’on rajoute son nom." »
"J’ai déménagé 10 fois et menti autant"
La vie locative de Julia, 30 ans, a toujours été rythmée de falsifications et de mensonges. "Depuis mes 20 ans, j’ai fraudé à dix reprises pour avoir un appartement", déclare la jeune Montpelliéraine. Sa seule exception, c’est le jour où elle a décidé de s’installer seule. A l’époque, son père accepte d’être garant :
« "Ce qu’il ignorait, c’est qu’il l’a été pour les cinq années qui ont suivies. A chaque déménagement, on me demandait ses fiches d’imposition et moi je me contentais de changer la date.
Il m’est aussi arrivé de gonfler mes revenus ou encore de mentir sur mon cursus universitaire parce que faire du droit, c’est plus vendeur pour le proprio que de faire de la philo." »
Plutôt à l’aise avec Photoshopp, la jeune femme n’a jamais hésité à "embellir la réalité" pour "être la candidate parfaite".
« "Je me rappelle d’une fois où je me suis carrément grimée pour changer de look. J’avais déjà pas mal de tatouages sur les bras et les cheveux bleus, j’ai tout caché et ça a fonctionné." »
Aujourd’hui, Julia est propriétaire d’un appartement. Pour obtenir son prêt, elle a aussi pris le risque de gonfler ses revenus et tout le monde n’y a vu que du feu.
Publié le 12 février 2018 à 12h04
« "Je vais encore devoir magouiller. Ça me dégoûte." »
Tous les jours depuis trois mois, c’est devenu une routine. Arthur*, 27 ans, fouille les limbes d’internet pour dénicher des annonces d’appartements, envoie un mail-type avec en pièce jointe son dossier de 50 pages, mais rien ne se passe. Au mieux, on lui répond que "son profil ne convient pas". Au pire, sa candidature n’est même pas examinée.
« "Trouver un toit, ça a toujours été une galère sans nom pour moi. Etudiant, je n’avais pas de garants. J’ai dû bidouiller mon job chez Ikea pour que ça passe. Quand j’ai commencé à bosser, je me suis dit que ça serait plus simple. En fait, c’est pire." »
Depuis six ans, Arthur travaille. Sa copine aussi. A deux, ils touchent en moyenne 3.400 euros. Des revenus corrects qui pourraient leur permettre de trouver le logement à 1.000 euros auquel ils aspirent.
« "Le souci, c’est que l’un comme l’autre on dépend du régime des intermittents du spectacle. Peu importe nos revenus ou le fait que nous travaillons comme des acharnés, nous ne sommes pas en CDI. Et ça, c’est rédhibitoire. Là, on est au pied du mur. Je suis prêt à tout pour trouver un appart." »
Tricher, mentir, falsifier des documents dans l’espoir de pouvoir louer enfin un appartement, de nombreux Français ont un jour envisager de prendre ce risque. Arthur et d’autres ont franchi la limite. Jusqu’où sont-ils allés ? Ils nous racontent.
"J’ai dû passer un entretien d’embauche"
Son diplôme de journaliste en poche, Caroline, 25 ans, a voulu s’installer à Paris pour trouver un travail.
« "Tous les jours, je regardais les annonces, je visitais des appartements miteux et je déposais mon dossier dès que le logement était à peu près correct. En attendant, je n’avais pas d’autres choix que de faire la tournée des canapés de mes amis." »
Alors que Caroline galère, un de ses amis, qui se trouve plus ou moins dans la même situation, déniche la perle rare en seulement quinze jours. Sa technique : créer de toute pièce un CDI à 3.000 euros sur Photoshop. "Je ne voulais pas en arriver là. J’étais persuadée qu’avec de la persévérance et de la bonne volonté, ça allait bien finir pas marcher", souligne la jeune femme.
Mais les mois passent et elle cesse de compter le nombre de logements qui défilent sous son nez.
« "J’ai fini par me faire une raison. Sans garants, sans CDI, je n’avais aucune chance. Alors, je me suis emparée de mon ancienne carte étudiante, et j’ai falsifié la date." »
C’est bien connu, les propriétaires préfèrent les étudiants aux jeunes actifs. Et puis un jour, la roue tourne : après une énième visite qui se solde par refus, un agent immobilier appelle Caroline pour lui proposer une visite. L’annonce n’est pas encore en ligne, elle a 10 minutes pour venir.
« "Je crois qu’elle a eu pitié de moi. Il se trouve que l’appartement répondait à toutes mes attentes. Je le voulais, mais il fallait convaincre la propriétaire avant. Ce que je n’avais pas prévu, c’est que j’allais passer un entretien d’embauche." »
Caroline répète son rôle d’étudiante-en-stage-bientôt-diplômée. Au grand oral, elle reste vague et évoque à demi-mot qu’elle souhaite devenir journaliste, préférant élargir à une "possible carrière dans la communication".
« "J’étais plus stressée pour cet entretien que par les concours et examens que j’avais pu passer avant. Au final, j’ai eu l’appartement. J’y vis encore et je n’ai jamais eu le moindre souci pour payer mon loyer.
Paradoxalement, j'ai trouvé un boulot plus facilement qu'un appart... dans un secteur pourtant assez bouché." »
"Officiellement, je suis en coloc’ avec ma mère"
La liste des documents exigéshttps://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do;jsessionid=D39026FB28925235BF9D888EFDDDBA07.tpdila17v_3?cidTexte=JORFTEXT000031444493&dateTexte=&oldAction=rechJO&categorieLien=id&idJO=JORFCONT000031443881 par un bailleur est réglée comme du papier à musique : une pièce d’identité, un justificatif de domicile, un ou plusieurs documents attestant d’une activité professionnelle, les trois derniers bulletins de salaire et la dernière feuille d’imposition.
A cela s’ajoute des critères draconiens : gagner trois fois le loyer, avoir un CDI et parfois des garants. De part son métier d’agent immobilier, Mehdi a souvent eu entre les mains des dossiers falsifiés.
« "On les repère parce que les documents sont mal photoshoppés, que la période d’ancienneté varie selon les papiers, tout comme l’avis d’imposition. Quand ça arrive, nous nous contentons d’écarter le dossier. Si nous ne le faisons pas, le propriétaire peut se retourner contre nous." »
Mehdi reconnaît que parfois il "pousse" un dossier, même si tous les critères ne sont pas remplis.
« "Il arrive que les propriétaires soient moins exigeants, plus compréhensifs. Le souci, c’est que près de 70% d’entre eux font appel à une assurance loyers impayés. https://votreargent.lexpress.fr/immobilier/loyers-impayes-une-vraie-galere-pour-les-proprietaires_1606216.html C’est alors l’assurance qui choisit le candidat. L’aspect humain n’a alors aucune valeur. Il faut juste rentrer dans des cases, si ce n’est pas le cas, c’est foutu." »
En CDD, Flavie ne rentrait pas dans aucune case.
« "Je venais de décrocher un poste dans un hôpital psychiatrique de Lyon. J’étais fière d’y être arrivée, mais ma recherche d’appartement était un tel fiasco que j’ai commencé à me remettre en question. C’est comme si tout ce que j’avais accompli n’avait aucune valeur." »
Trop honnête, Flavie se refuse à falsifier son dossier. Au lieu de cela, elle trouve un compromis : sa mère sera elle aussi sur le bail.
« "L’agent immobilier savait très bien qu’il s’agissait d’une fausse ‘colocation’. Quelle hypocrisie ! Je ne regrette pas de l’avoir fait, mais je trouve ça triste d’être résumée à un nombre sur une fiche de paie. On est juste des papiers." »
"J’ai omis de parler de mon mari sans emploi"
Léa, elle, n’a pas à proprement parler triché. En 2016, cette auxiliaire en puéricultrice de 28 ans décide de se rapprocher de la capitale pour son travail. Mariée, en CDI, avec un salaire correct… Sur le papier, la jeune femme a plutôt un bon profil.
Pourtant, pendant près de six mois, elle essuie refus sur refus sans qu’on lui fournisse la moindre explication.
« "Un jour, un agent immobilier m’a fait entendre que mon dossier aurait plus de chance si je prenais l’appartement seule. Parce que mon mari était à la recherche d’un emploi, nous n’étions pas suffisamment fiables." »
Dès cet instant, Léa joue le jeu et enchaîne les visites sans jamais mentionner le fait qu’elle est mariée. Qu’importe l’alliance qu’elle porte à l’annulaire gauche.
« "A partir du moment où j’ai omis de parler de mon mari, nous n’avons eu que l’embarras du choix. J’ai signé le bail seule. Puis, l’air de rien, j’ai demandé par la suite qu’on rajoute son nom." »
"J’ai déménagé 10 fois et menti autant"
La vie locative de Julia, 30 ans, a toujours été rythmée de falsifications et de mensonges. "Depuis mes 20 ans, j’ai fraudé à dix reprises pour avoir un appartement", déclare la jeune Montpelliéraine. Sa seule exception, c’est le jour où elle a décidé de s’installer seule. A l’époque, son père accepte d’être garant :
« "Ce qu’il ignorait, c’est qu’il l’a été pour les cinq années qui ont suivies. A chaque déménagement, on me demandait ses fiches d’imposition et moi je me contentais de changer la date.
Il m’est aussi arrivé de gonfler mes revenus ou encore de mentir sur mon cursus universitaire parce que faire du droit, c’est plus vendeur pour le proprio que de faire de la philo." »
Plutôt à l’aise avec Photoshopp, la jeune femme n’a jamais hésité à "embellir la réalité" pour "être la candidate parfaite".
« "Je me rappelle d’une fois où je me suis carrément grimée pour changer de look. J’avais déjà pas mal de tatouages sur les bras et les cheveux bleus, j’ai tout caché et ça a fonctionné." »
Aujourd’hui, Julia est propriétaire d’un appartement. Pour obtenir son prêt, elle a aussi pris le risque de gonfler ses revenus et tout le monde n’y a vu que du feu.
Re: Tout ce que vous êtes prêts à faire pour obtenir un appartement
Que risque-t-on ?
Falsifier des documents en vue d’obtenir un appartement est un délit de faux et usage de faux puni par la loi (article 441-1 du Code pénal)https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006070719&idArticle=LEGIARTI000006418752 . Les fraudeurs sont passibles d’une peine de trois ans d’emprisonnement et de 45.000 euros d’amende. Le bailleur est en droit de saisir le juge pour obtenir l’annulation du bail et réclamer des dommages et intérêts.
Ça, c’est pour la théorie. Dans la pratique, Maître Régine Vanitou, avocate spécialisée dans le droit de l’immobilier, précise n’avoir jamais été confrontée à ce type d’affaires en 15 ans de carrière.
« "Le fraudeur aura des soucis à se faire uniquement s’il ne paye pas son loyer. La production de faux-documents se greffe essentiellement à un problème d’impayés." »
Par expérience, l’avocate précise que les mauvais payeurs ne sont quasiment jamais des fraudeurs.
« "Ce sont des personnes qui ont connu un accident de parcours, comme un décès, la perte d’un emploi ou une séparation." »
D’ailleurs, il faut savoir qu’on dénombre seulement 3% d’impayés sur le logement en France. Preuve qu’avoir un toit sur la tête est une priorité pour la majorité des Français.
"Frauder m’a sauvé la vie"
Pour Estelle, aujourd’hui 33 ans, avoir un logement n’était pas seulement une priorité, mais une question de survie. Les faits remontent à une dizaine d’années. A l’époque, la jeune femme est sans travail, accro à la drogue et vit dans un squat parisien.
« "Avec mon copain, nous faisions la manche et nous vendions de la drogue. Et puis, un jour, il s’est fait choppé et s’est retrouvé en taule. C’est là que je me suis rendu compte je devais reprendre ma vie en main, me sortir les doigts du cul." »
Pour commencer, elle trouve un travail dans la restauration.
« "Je faisais mes services l’air de rien. Personne ne se doutait que je vivais dans un squat en préfabriqué, sans chauffage, sans eau courante et avec un simple électrogène.
Chaque soir était une lutte permanente avec moi-même. Ma plus grosse crainte était de rentrer et de tomber nez-à-nez avec un autre squatteur en train de se droguer et de replonger." »
Le problème, c’est que la jeune femme a beau avoir un CDI, elle gagne à peine le SMIC et est toujours en période d’essai. Chaque visite se solde par un refus. Elle décide de récupérer les fiches de paie d’une amie qui travaillait dans le même groupe qu’elle et prend le premier appartement qui s’offre à elle, "une cage à poule qui empestait le fromage".
« "J’y ai vécu deux ans. Et puis, un jour, ma responsable m’a convoqué. Ma propriétaire avait cherché à me joindre et avait fini par contacter mon faux employeur. Ils m’ont grillé. J’ai écopé d’un avertissement et d’une mise à pied de trois jours. J’ai aussi fait une croix sur la promotion qu’on me faisait miroiter." »
Mais qu’importe, Estelle ne regrette absolument rien :
« "Sans ce logement, ma vie n’aurait pas été la même. Je serai retourné à la première marche. Depuis, j’ai quitté Paris. Loin, très loin et je n’ai jamais eu besoin de frauder à nouveau. J'ai un boulot que j'aime, un conjoint, des enfants, et je suis clean depuis des années.
Trois jours de mise à pied… Ma foi, c'est rien contre tout ce que ça m'a apporté." »
*Les prénoms ont été changés.
Falsifier des documents en vue d’obtenir un appartement est un délit de faux et usage de faux puni par la loi (article 441-1 du Code pénal)https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006070719&idArticle=LEGIARTI000006418752 . Les fraudeurs sont passibles d’une peine de trois ans d’emprisonnement et de 45.000 euros d’amende. Le bailleur est en droit de saisir le juge pour obtenir l’annulation du bail et réclamer des dommages et intérêts.
Ça, c’est pour la théorie. Dans la pratique, Maître Régine Vanitou, avocate spécialisée dans le droit de l’immobilier, précise n’avoir jamais été confrontée à ce type d’affaires en 15 ans de carrière.
« "Le fraudeur aura des soucis à se faire uniquement s’il ne paye pas son loyer. La production de faux-documents se greffe essentiellement à un problème d’impayés." »
Par expérience, l’avocate précise que les mauvais payeurs ne sont quasiment jamais des fraudeurs.
« "Ce sont des personnes qui ont connu un accident de parcours, comme un décès, la perte d’un emploi ou une séparation." »
D’ailleurs, il faut savoir qu’on dénombre seulement 3% d’impayés sur le logement en France. Preuve qu’avoir un toit sur la tête est une priorité pour la majorité des Français.
"Frauder m’a sauvé la vie"
Pour Estelle, aujourd’hui 33 ans, avoir un logement n’était pas seulement une priorité, mais une question de survie. Les faits remontent à une dizaine d’années. A l’époque, la jeune femme est sans travail, accro à la drogue et vit dans un squat parisien.
« "Avec mon copain, nous faisions la manche et nous vendions de la drogue. Et puis, un jour, il s’est fait choppé et s’est retrouvé en taule. C’est là que je me suis rendu compte je devais reprendre ma vie en main, me sortir les doigts du cul." »
Pour commencer, elle trouve un travail dans la restauration.
« "Je faisais mes services l’air de rien. Personne ne se doutait que je vivais dans un squat en préfabriqué, sans chauffage, sans eau courante et avec un simple électrogène.
Chaque soir était une lutte permanente avec moi-même. Ma plus grosse crainte était de rentrer et de tomber nez-à-nez avec un autre squatteur en train de se droguer et de replonger." »
Le problème, c’est que la jeune femme a beau avoir un CDI, elle gagne à peine le SMIC et est toujours en période d’essai. Chaque visite se solde par un refus. Elle décide de récupérer les fiches de paie d’une amie qui travaillait dans le même groupe qu’elle et prend le premier appartement qui s’offre à elle, "une cage à poule qui empestait le fromage".
« "J’y ai vécu deux ans. Et puis, un jour, ma responsable m’a convoqué. Ma propriétaire avait cherché à me joindre et avait fini par contacter mon faux employeur. Ils m’ont grillé. J’ai écopé d’un avertissement et d’une mise à pied de trois jours. J’ai aussi fait une croix sur la promotion qu’on me faisait miroiter." »
Mais qu’importe, Estelle ne regrette absolument rien :
« "Sans ce logement, ma vie n’aurait pas été la même. Je serai retourné à la première marche. Depuis, j’ai quitté Paris. Loin, très loin et je n’ai jamais eu besoin de frauder à nouveau. J'ai un boulot que j'aime, un conjoint, des enfants, et je suis clean depuis des années.
Trois jours de mise à pied… Ma foi, c'est rien contre tout ce que ça m'a apporté." »
*Les prénoms ont été changés.
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