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Assurance chômage : et si la négociation était reportée d'un an ?

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Message par Admin Mar 3 Mai - 18:13

Par Jean-Christophe Chanut | 02/05/2016, 14:46

ARTICLE LA TRIBUNE



Le "chantage" du Medef (ici son président Pierre Gattaz) de quitter la négociation sur l'assurance chômage pourrrait être le pretexte rêvé pour retarder d'un an les nouvelles règles d'inemnisation des chômeurs.... Après la présidentielle et quand la courbe du chômage se sera - sans doute - enfin inversée. (Crédits : reuters.com) La ministre du Travail a commencé à évoquer un "plan B" si la négociation sur l'assurance chômage devait s'arrêter, victime du chantage du Medef. Le scénario d'un report d'un an pour fixer de nouvelles règles d'indemnisation satisfait, en réalité, presque tout le monde.

Et si la négociation sur l'assurance chômage n'arrivait pas à son terme ? Un scénario qui devient plausible et qui semble faire son chemin dans l'esprit de la ministre du Travail Myriam El Khomri. Il faut dire qu'un report d'application pendant un an des actuelles règles d'indemnisation des demandeurs d'emploi ne dérangerait... personne, à part, peut-être le ministère des Finances.

La négociation sur l'assurance chômage débutée en février entres organisations patronales et syndicales doit normalement aboutir en juin afin que les nouvelles règles d'indemnisation des chômeurs s'appliquent à compter du 1er juillet. Les discussions sont mal parties. Le gouvernement est venu d'entrer de jeu s'immiscer dans les débats en évoquant une « obligation » de taxer davantage - c'est- à- dire augmenter la cotisation d'assurance chômage - les contrats précaires de courte du durée.C'est peu de dire que le camp patronal (Medef, CGPME et UPA) n'a pas apprécié. En plus de cela, l'accord spécifique concernant les « annexes 8 et 10 » de la convention d'assurance chômage sur les intermittents, signé par la CGT et FO, déplaît fortement au Medef et la CFDT car il ne prévoit « que » 80 millions d'économies au lieu des 185 millions d'euros attendus. Aussi, il n'est pas certains qu'il soit « validé ». Enfin, le Medef menace de quitter la négociation si le gouvernement ne revoit pas sa copie sur la loi travail. Autant d'embûches donc sur le chemin d'un accord, déjà que, en temps normal, les négociations sur l'assurance chômage sont rarement de tout repos


Quand la ministre du Travail évoque (déjà) un report

Tout semble se mettre progressivement en place donc pour que la négociation ne débouche pas. Intervenant dimanche 1er mai au Grand Rendez-vous Europe 1/i TELE/Le Monde, la ministre du Travail a dit réfléchir à « trois options » : "La première est de leur laisser un temps supplémentaire pour qu'ils négocient, la deuxième est de renouveler la convention actuelle sur un an, la troisième est que le gouvernement reprenne la main et "modifie les paramètres ». Il quand même sacrément cocasse qu'une ministre évoque déjà à ce stade un « plan B » pour l'assurance chômage. Ce qui semble indiquer que Myriam El Khomri n'y croit pas non plus.

En tout état de cause, on voit très mal le gouvernement s'emparer de la troisième option évoquée par la ministre. Déjà engluée avec le projet de loi Travail qui arrive mardi 3 mai devant l'Assemblée nationale et qui promet des débats houleux, Myriam El Khomri ne va certainement pas fixer provisoirement les règles d'indemnisation du chômage... Trop de coups à prendre.

En revanche, l'option « renouveler la convention actuelle pour un an » semble assez probable. D'abord, cela permettrait de désamorcer le chantage du Medef qui menace de quitter la négociation. Il doit donner sa réponse définitive le 9 mai. S'il décide de partir, alors gouvernement aura beau jeu de constater le désaccord et il pourra demander aux partenaires sociaux de prolonger la convention actuelle d'un an. L'élection présidentielle sera alors passée et il sera moins délicat politiquement de toucher à l'indemnisation des chômeurs.


Plus facile de négocier si la baisse du chômage est au rendez-vous


Mais un autre élément milite en faveur de ce scénario. Il y a de fortes chances pour que la courbe du chômage commence à réellement et durablement s'inverser vers la fin 2016. La baisse « surprise » de 60.000 chômeurs en mars (- 1,7%)- essentiellement due à un transfert entre catégories de demandeurs d'emploi - est sans doute le prémisse à ce frémissement. Dès lors que cette inversion de la courbe sera avérée, il y a intérêt pour les partenaires sociaux à arrêter de nouvelles règles d'indemnisation collant à cette situation. Il semble en effet difficile, actuellement, de durcir les règles d'indemnisations - ce que proposent les organisations patronales pour réaliser des économies, notamment aux dépens des chômeurs les plus âgés -, alors que la courbe du chômage continue d'augmenter ou, à tout le moins, reste à un niveau élevé. Il sera plus facile de faire des économies avec un chômage en baisse.

Du côté des syndicats, contactés par La Tribune, on ne nie pas qu'un tel scénario aurait des avantages même s'il n'est pas question de le crier sur les toits.
Le problème du déficit de l'Unedic
En réalité, le seul qui serait contrarié, c'est le ministre des Finances Michel Sapin. En effet, la France s'est engagée auprès de la Commission européenne à ramener en 2017 son déficit public sous la barre des 3% du PIB, comme le prévoient les critères de Maastricht. Or, le déficit de l'Unedic (l'organisme paritaire qui gère l'assurance chômage) fait partie intégrante des déficits publics pris en compte pour le respect de ce critère des 3%... Or, les gestionnaires de l'Unedic tablent sur un déficit du régime qui atteindrait 4,2 milliards d'euros en 2016, portant la dette cumulée à 30 milliards d'euros.... Soit une quasi année de cotisation.

D'où le grand intérêt, cette année, que les pouvoirs publics portent à l'assurance chômage qui relève pourtant de la compétence des partenaires sociaux. Michel Sapin veut que le déficit du régime fonde. Ceci dit, même si la négociation est différée d'un an, le locataire de Bercy - l'actuel ou son successeur - pourra sans doute tenir l'objectif de 3% en 2017 si la reprise de la croissance se confirme, ce qui entraînera quelques marges de manœuvre budgétaires supplémentaires. Et ce d'autant plus que les finances de l'assurance chômage sont célèbres pour leur très fort « effet ciseau » : en période de fort chômage, les recettes liées aux cotisations diminuent, alors que les dépenses d'allocation augmentent...Et vice versa : quand le chômage repart à la baisse les cotisations augmentent rapidement. Donc même Michel Sapin pourrait se laisser convaincre.

In fine, tout le monde ou presque ne verrait pas d'inconvénient majeur à ce que cette délicate négociation sur l'assurance chômage qui intervient dans un climat social assombri par les manifestations liées au projet de loi travail soit reportée. Bien entendu, tous les acteurs pousseront des cris d'orfraie si ce scénario se concrétise... Mais hors micro et caméra ce sera plutôt un « ouf » de soulagement


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