L’Europe oblige-t-elle à siphonner les dépôts ???
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L’Europe oblige-t-elle à siphonner les dépôts ???
L’Europe oblige-t-elle à siphonner les dépôts des épargnants en cas de faillites bancaires, comme l’affirme Le Pen ?
Derek Perrotte
ARTICLE LES ECHOS
L’Europe oblige-t-elle à siphonner les dépôts des épargnants en cas de faillites bancaires, comme l’affirme Le Pen ?
Marine Le Pen se pose en défenseur de l’épargne des Français, jurant que « L’Union européenne prévoit de ponctionner les comptes bancaires pour sauver les banques ». Verdict : caricatural
Peuple de France, prends garde, la perfide Europe veut te faire les poches. Dans sa croisade contre Bruxelles, Marine Le Pen ne manque jamais l'occasion d'entonner son antienne. « En cas de défaillance bancaire, l'Union Européenne prévoit de ponctionner les comptes bancaires des Français pour sauver les banques ! », a répété mercredi sur LCP https://www.facebook.com/reseau.francebleu/videos/1711245358892122/ , puis sur Twitter, la candidate du Front National à l'élection présidentielle. Le « story telling » est rodé et résumé par un slogan, « c'est votre argent ou l'euro », brandi en argument choc pour sortir de la monnaie unique - en omettant juste au passage les effets dévastateurs que cela aurait sur l'économie, un détail...
L'effet épouvantail est efficace car basé sur une partie de la réalité. La directive européenne sur la résolution bancaire de 2014 (directive BRRD) - premier pilier de l'Union bancaire et en vigueur depuis le 1erjanvier 2016 https://www.lesechos.fr/20/12/2013/LesEchos/21589-118-ECH_vie-et-mort-d-une-banque-dans-le-nouveau-cadre-europeen.htm - prévoit bien la possibilité de ponctionner en dernier recours les comptes de dépôts des clients pour contribuer au sauvetage de leur banque. Mais le discours du FN est caricatural. Tout d'abord, parce que Bruxelles n'a en la matière rien imposé de nouveau. Avant son intervention, « les particuliers étaient déjà exposés au risque de perte de leurs dépôts en cas de faillite bancaire », rappelle Jean-Guillaume de Tocqueville, avocat associé au sein du cabinet Gide.
Surtout, madame Michu ou monsieur Dupont n'ont en réalité pas à s'inquiéter pour leur PEL, leur livret A https://www.lesechos.fr/finance-marches/vernimmen/definition_livret-a.html#xtor=SEC-3168 ou leur bas de laine : depuis 1999, les dépôts bancaires sont garantis en France, via le Fonds de garantie des dépôts et de résolution (FGDR), financé par les banques. En 2010, le montant garanti a même été augmenté de plus de 30 % pour atteindre 100.000 euros par déposant et par établissement. Ce plafond a été repris et généralisé à toute l'Europe par la fameuse directive BRRD. En dessous de ce seuil de 100.000 euros, les déposants sont donc protégés quoi qu'il arrive.
Seules les personnes disposant de plus gros dépôts encourent un risque de pertes, soit une part très limitée des Français. En théorie, ces derniers peuvent toujours tenter de contourner le risque en disséminant leur capital dans divers établissements. En pratique, c'est laborieux et cela contraint à une gestion peu optimale.
Contrairement à ce que sous-tend le discours frontiste, le dispositif n'a pas non plus été bâti pour que les viles puissances de l'argent puissent si besoin détrousser en toute impunité les honnêtes citoyens. Au contraire, « la directive BBRD protège en réalité mieux les déposants qu'avant, en clarifiant la hiérarchie des créanciers et en les y plaçant à la toute fin », explique-t-on au FGDR. Les dépôts de particuliers ne peuvent ainsi être mis à contribution qu'après que soient déjà passés à la caisse tous les créanciers et les actionnaires.
C'est une vraie nouveauté : pendant la crise financière post-Lehman, les investisseurs ont été protégés et ce sont les Etats qui ont été appelés systématiquement à la rescousse pour éviter une crise bancaire systémique. Si bien que le dispositif mis en place par l'Union européenne vise en réalité à protéger madame Michu et monsieur Dupont https://www.lesechos.fr/28/03/2013/LesEchos/21406-034-ECH_europe---qui-doit-payer-pour-le-sauvetage-des-banques--.htm d'avoir à systématiquement payer, via leurs impôts, pour les faillites des banques de leurs voisins. « L'objectif est de pouvoir restructurer les banques au bord de la faillite sans que le contribuable doive mettre la main à la poche pour préserver la stabilité financière», expliquait la Commission européenne au lancement de la directive. C'est toute la philosophie des procédures de « bail in » (« renflouement interne ») calibrées par l'Europe pour éviter les recours au « bail out », le renflouement par les Etats, qui pénalise alors tous les contribuables, pas seulement les plus aisés.
Ce n'est certes pas une garantie tout risque. Dès 2013, avant la directive BRRD, la Banque centrale de Chypre avait même créé crée un précédent : dans le cadre d'un plan européen de sauvetage du secteur financier de l'île, elle avait accepté des ponctions de 47,5% sur les dépôts de plus de 100.000 euros à la Bank of Cyprus, provoquant la colère des résidents et une précipitation collective vers les distributeurs automatiques.
L'exemple récent de la banque italienne Monte Dei Paschi Di Sienna rappelle qu'une faillite d'un établissement majeur reste possible en Europe. Mais l'épisode a aussi montré que Bruxelles, marqué par l'épisode chypriote, était prêt à une lecture très souple de ses textes pour éviter une ponction des dépôts si jamais celle-ci risquait de déstabiliser trop fortement le système bancaire : la Commission a ainsi laissé l'Etat italien sauver la banque via une aide publique déguisée sur laquelle elle a fermé les yeux.
Reste que le risque de faillite apparaît bien contenu en France : dans les derniers tests de résistance des banques en cas de choc majeur, dévoilés fin juillet 2016 par l'Autorité Bancaire européenne, les banques hexagonales font toutes figures de bonnes et solides élèves. « Il n'y a pas eu de faillite bancaire en France pendant la crise. La régulation y est forte et protège bien les épargnants », insiste Jean-Guillaume de Tocqueville.
Derek Perrotte
https://www.lesechos.fr/monde/europe/0211844379007-leurope-oblige-t-elle-a-siphonner-les-depots-des-epargnants-en-cas-de-faillites-bancaires-comme-laffirme-le-pen-2069568.php#BJthQXMXXbwlGMkx.99
Derek Perrotte
ARTICLE LES ECHOS
L’Europe oblige-t-elle à siphonner les dépôts des épargnants en cas de faillites bancaires, comme l’affirme Le Pen ?
Marine Le Pen se pose en défenseur de l’épargne des Français, jurant que « L’Union européenne prévoit de ponctionner les comptes bancaires pour sauver les banques ». Verdict : caricatural
Peuple de France, prends garde, la perfide Europe veut te faire les poches. Dans sa croisade contre Bruxelles, Marine Le Pen ne manque jamais l'occasion d'entonner son antienne. « En cas de défaillance bancaire, l'Union Européenne prévoit de ponctionner les comptes bancaires des Français pour sauver les banques ! », a répété mercredi sur LCP https://www.facebook.com/reseau.francebleu/videos/1711245358892122/ , puis sur Twitter, la candidate du Front National à l'élection présidentielle. Le « story telling » est rodé et résumé par un slogan, « c'est votre argent ou l'euro », brandi en argument choc pour sortir de la monnaie unique - en omettant juste au passage les effets dévastateurs que cela aurait sur l'économie, un détail...
L'effet épouvantail est efficace car basé sur une partie de la réalité. La directive européenne sur la résolution bancaire de 2014 (directive BRRD) - premier pilier de l'Union bancaire et en vigueur depuis le 1erjanvier 2016 https://www.lesechos.fr/20/12/2013/LesEchos/21589-118-ECH_vie-et-mort-d-une-banque-dans-le-nouveau-cadre-europeen.htm - prévoit bien la possibilité de ponctionner en dernier recours les comptes de dépôts des clients pour contribuer au sauvetage de leur banque. Mais le discours du FN est caricatural. Tout d'abord, parce que Bruxelles n'a en la matière rien imposé de nouveau. Avant son intervention, « les particuliers étaient déjà exposés au risque de perte de leurs dépôts en cas de faillite bancaire », rappelle Jean-Guillaume de Tocqueville, avocat associé au sein du cabinet Gide.
Surtout, madame Michu ou monsieur Dupont n'ont en réalité pas à s'inquiéter pour leur PEL, leur livret A https://www.lesechos.fr/finance-marches/vernimmen/definition_livret-a.html#xtor=SEC-3168 ou leur bas de laine : depuis 1999, les dépôts bancaires sont garantis en France, via le Fonds de garantie des dépôts et de résolution (FGDR), financé par les banques. En 2010, le montant garanti a même été augmenté de plus de 30 % pour atteindre 100.000 euros par déposant et par établissement. Ce plafond a été repris et généralisé à toute l'Europe par la fameuse directive BRRD. En dessous de ce seuil de 100.000 euros, les déposants sont donc protégés quoi qu'il arrive.
Seules les personnes disposant de plus gros dépôts encourent un risque de pertes, soit une part très limitée des Français. En théorie, ces derniers peuvent toujours tenter de contourner le risque en disséminant leur capital dans divers établissements. En pratique, c'est laborieux et cela contraint à une gestion peu optimale.
Contrairement à ce que sous-tend le discours frontiste, le dispositif n'a pas non plus été bâti pour que les viles puissances de l'argent puissent si besoin détrousser en toute impunité les honnêtes citoyens. Au contraire, « la directive BBRD protège en réalité mieux les déposants qu'avant, en clarifiant la hiérarchie des créanciers et en les y plaçant à la toute fin », explique-t-on au FGDR. Les dépôts de particuliers ne peuvent ainsi être mis à contribution qu'après que soient déjà passés à la caisse tous les créanciers et les actionnaires.
C'est une vraie nouveauté : pendant la crise financière post-Lehman, les investisseurs ont été protégés et ce sont les Etats qui ont été appelés systématiquement à la rescousse pour éviter une crise bancaire systémique. Si bien que le dispositif mis en place par l'Union européenne vise en réalité à protéger madame Michu et monsieur Dupont https://www.lesechos.fr/28/03/2013/LesEchos/21406-034-ECH_europe---qui-doit-payer-pour-le-sauvetage-des-banques--.htm d'avoir à systématiquement payer, via leurs impôts, pour les faillites des banques de leurs voisins. « L'objectif est de pouvoir restructurer les banques au bord de la faillite sans que le contribuable doive mettre la main à la poche pour préserver la stabilité financière», expliquait la Commission européenne au lancement de la directive. C'est toute la philosophie des procédures de « bail in » (« renflouement interne ») calibrées par l'Europe pour éviter les recours au « bail out », le renflouement par les Etats, qui pénalise alors tous les contribuables, pas seulement les plus aisés.
Ce n'est certes pas une garantie tout risque. Dès 2013, avant la directive BRRD, la Banque centrale de Chypre avait même créé crée un précédent : dans le cadre d'un plan européen de sauvetage du secteur financier de l'île, elle avait accepté des ponctions de 47,5% sur les dépôts de plus de 100.000 euros à la Bank of Cyprus, provoquant la colère des résidents et une précipitation collective vers les distributeurs automatiques.
L'exemple récent de la banque italienne Monte Dei Paschi Di Sienna rappelle qu'une faillite d'un établissement majeur reste possible en Europe. Mais l'épisode a aussi montré que Bruxelles, marqué par l'épisode chypriote, était prêt à une lecture très souple de ses textes pour éviter une ponction des dépôts si jamais celle-ci risquait de déstabiliser trop fortement le système bancaire : la Commission a ainsi laissé l'Etat italien sauver la banque via une aide publique déguisée sur laquelle elle a fermé les yeux.
Reste que le risque de faillite apparaît bien contenu en France : dans les derniers tests de résistance des banques en cas de choc majeur, dévoilés fin juillet 2016 par l'Autorité Bancaire européenne, les banques hexagonales font toutes figures de bonnes et solides élèves. « Il n'y a pas eu de faillite bancaire en France pendant la crise. La régulation y est forte et protège bien les épargnants », insiste Jean-Guillaume de Tocqueville.
Derek Perrotte
https://www.lesechos.fr/monde/europe/0211844379007-leurope-oblige-t-elle-a-siphonner-les-depots-des-epargnants-en-cas-de-faillites-bancaires-comme-laffirme-le-pen-2069568.php#BJthQXMXXbwlGMkx.99
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