Maisons de retraite : les députés montent au créneau
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Maisons de retraite : les députés montent au créneau
Par Jean-Christophe Martineau le 14 septembre 2017
L’Assemblée nationale s’est saisie de l’épineux dossier des maisons de retraite. La "mission flash" diligentée le 3 août par la commission des Affaires sociales a rendu le 13 septembre ses conclusions et adressé ses préconisations à la ministre des Solidarités et de la Santé, Agnès Buzyn.
Ce travail parlementaire intervient après une série de grèves déclenchées dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) au printemps et à l’été 2017.
Les personnels dénonçaient leur manque de moyens pour prendre soin des résidents qui leur sont confiés. Le constat dressé par la mission n’étonnera pas les professionnels du secteur, ni les familles des personnes âgées vivant en Ehpad… "Le secteur est en souffrance, clairement!", remarque Monique Iborra, députée (La République en Marche) de Haute-Garonne, qui a piloté les travaux parlementaires.
Sous-effectif chronique et difficultés de recrutement
Premier élément pointé par l’élue: le sous-effectif en personnel, "unanimement reconnu" par l’ensemble des professionnels, des élus, des représentants des familles. "Le recrutement des personnels est difficile, notamment chez les aides-soignants, précise-t-elle, cela entraîne des recrutements de personnes "faisant-fonction" dont la qualification est insuffisante." À ce manque d’effectif chronique s’ajoute le fait que les établissements accueillent de plus en plus de résidents lourdement dépendants.
Une situation qui rend les conditions de travail "particulièrement préoccupantes, tant du point de vue physique que psychologique, poursuit la députée, le taux d’absentéisme est en moyenne de 10% et les accidents du travail en Ehpad seraient aujourd’hui supérieurs à ceux enregistrés dans le secteur du BTP…" Autres lacunes soulignées par la mission: les difficultés à recruter et à fidéliser les médecins coordonnateurs dans les Ehpad – un tiers n’en n’aurait pas, alors que leur présence est obligatoire- ; l’absence d’infirmier de nuit dans "la grande majorité des établissements".
Une réalité qui génère un nombre important d’hospitalisations – parfois évitables-aux urgences. Selon l’Agence régionale de santé d’Ile-de-France, la présence d’un infirmier dans trois établissements (via une permanence téléphonique) permettrait d’éviter quatre jours d’hospitalisation par an et par résident…
La nouvelle tarification des Ehpad contestée
Monique Ibarro rappelle également le mécontentement provoqué par la réforme de la tarification des Ehpad appliquée depuis 2017 et qui se heurte à l’opposition des établissements publics. En cause, une nouvelle formule de calcul de l’enveloppe "dépendance" alloué" à chaque département et qui entraînerait, selon la Fédération hospitalière de France (FHF), une perte de 200 millions d'euros pour les maisons de retraite publiques, au profit des Ehpad privés. Une dizaine de départements refuseraient même, selon la députée, d’appliquer la réforme! Enfin, elle s’inquiète du reste à charge assumé par les résidents et leurs familles dans un contexte où certains départements réduisent, pour des raisons budgétaires, le nombre de places qui bénéficient de l’aide sociale à l’hébergement.
Parvenir à fixer des normes minimales de personnel par Ehpad
La commission des Affaires sociales fait une série de propositions au gouvernement. Elle suggère au ministère de la Santé de mettre en place un groupe de travail afin de revaloriser le statut des aides-soignants "dans un délai très court", de prévoir dans le budget des établissements la présence d’infirmier de nuit ; de préserver les contrats aidés dans les Ehpad "souffrant de sous-effectifs patents en 2017".
Enfin, la mission demande à ce que soient évalués les effets de la nouvelle tarification et que soit vérifiée l’ampleur des inégalités entre établissements qu’elle induit. Le cas échéant, le décret initial pourrait être modifié, propose-t-elle. Une éventualité que le Synerpa, syndicat des maisons de retraite privées, refuse d’emblée. "Cette réforme apportera davantage de souplesse et d’autonomie dans la gestion quotidienne des Ehpad, souligne l’organisation professionnelle, il nous semble délicat de revenir en arrière." Enfin, au cours du premier semestre 2018, la "mission flash" pourrait se transformer en mission d’observation des conditions de travail et de l’organisation des établissements. Objectif: élaborer des normes minimales de personnel par établissements, publics et privés. À suivre…
L’Assemblée nationale s’est saisie de l’épineux dossier des maisons de retraite. La "mission flash" diligentée le 3 août par la commission des Affaires sociales a rendu le 13 septembre ses conclusions et adressé ses préconisations à la ministre des Solidarités et de la Santé, Agnès Buzyn.
Ce travail parlementaire intervient après une série de grèves déclenchées dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) au printemps et à l’été 2017.
Les personnels dénonçaient leur manque de moyens pour prendre soin des résidents qui leur sont confiés. Le constat dressé par la mission n’étonnera pas les professionnels du secteur, ni les familles des personnes âgées vivant en Ehpad… "Le secteur est en souffrance, clairement!", remarque Monique Iborra, députée (La République en Marche) de Haute-Garonne, qui a piloté les travaux parlementaires.
Sous-effectif chronique et difficultés de recrutement
Premier élément pointé par l’élue: le sous-effectif en personnel, "unanimement reconnu" par l’ensemble des professionnels, des élus, des représentants des familles. "Le recrutement des personnels est difficile, notamment chez les aides-soignants, précise-t-elle, cela entraîne des recrutements de personnes "faisant-fonction" dont la qualification est insuffisante." À ce manque d’effectif chronique s’ajoute le fait que les établissements accueillent de plus en plus de résidents lourdement dépendants.
Une situation qui rend les conditions de travail "particulièrement préoccupantes, tant du point de vue physique que psychologique, poursuit la députée, le taux d’absentéisme est en moyenne de 10% et les accidents du travail en Ehpad seraient aujourd’hui supérieurs à ceux enregistrés dans le secteur du BTP…" Autres lacunes soulignées par la mission: les difficultés à recruter et à fidéliser les médecins coordonnateurs dans les Ehpad – un tiers n’en n’aurait pas, alors que leur présence est obligatoire- ; l’absence d’infirmier de nuit dans "la grande majorité des établissements".
Une réalité qui génère un nombre important d’hospitalisations – parfois évitables-aux urgences. Selon l’Agence régionale de santé d’Ile-de-France, la présence d’un infirmier dans trois établissements (via une permanence téléphonique) permettrait d’éviter quatre jours d’hospitalisation par an et par résident…
La nouvelle tarification des Ehpad contestée
Monique Ibarro rappelle également le mécontentement provoqué par la réforme de la tarification des Ehpad appliquée depuis 2017 et qui se heurte à l’opposition des établissements publics. En cause, une nouvelle formule de calcul de l’enveloppe "dépendance" alloué" à chaque département et qui entraînerait, selon la Fédération hospitalière de France (FHF), une perte de 200 millions d'euros pour les maisons de retraite publiques, au profit des Ehpad privés. Une dizaine de départements refuseraient même, selon la députée, d’appliquer la réforme! Enfin, elle s’inquiète du reste à charge assumé par les résidents et leurs familles dans un contexte où certains départements réduisent, pour des raisons budgétaires, le nombre de places qui bénéficient de l’aide sociale à l’hébergement.
Parvenir à fixer des normes minimales de personnel par Ehpad
La commission des Affaires sociales fait une série de propositions au gouvernement. Elle suggère au ministère de la Santé de mettre en place un groupe de travail afin de revaloriser le statut des aides-soignants "dans un délai très court", de prévoir dans le budget des établissements la présence d’infirmier de nuit ; de préserver les contrats aidés dans les Ehpad "souffrant de sous-effectifs patents en 2017".
Enfin, la mission demande à ce que soient évalués les effets de la nouvelle tarification et que soit vérifiée l’ampleur des inégalités entre établissements qu’elle induit. Le cas échéant, le décret initial pourrait être modifié, propose-t-elle. Une éventualité que le Synerpa, syndicat des maisons de retraite privées, refuse d’emblée. "Cette réforme apportera davantage de souplesse et d’autonomie dans la gestion quotidienne des Ehpad, souligne l’organisation professionnelle, il nous semble délicat de revenir en arrière." Enfin, au cours du premier semestre 2018, la "mission flash" pourrait se transformer en mission d’observation des conditions de travail et de l’organisation des établissements. Objectif: élaborer des normes minimales de personnel par établissements, publics et privés. À suivre…
Re: Maisons de retraite : les députés montent au créneau
Maisons de retraite: le manque de moyens pousse le personnel à la grève
Plusieurs établissements pour personnes âgées sont touchés par des arrêts de travail. Les aides-soignantes estiment ne pas être assez nombreuses pour s’occuper des résidents. L’analyse de Pascal Champvert, président de l’Association des directeurs au service des personnes âgées (AD-PA).
Des mouvements de grève se sont déclenchés ces dernières semaines par les personnels des maisons de retraite dans plusieurs départements: à Brest, Carhaix (29), Domme (24), Bruz et Chateaugiron (35), Romorantin (41), en région parisienne à Argenteuil, Chatenay-Malabry. Le plus emblématique, celui mené par des aides-soignantes de l’établissement Les Opalines à Foucherand dans le Jura, dure depuis le 3 avril 2017.
Au-delà de revendications salariales, les professionnels dénoncent les sous-effectifs qui nuisent à leur condition de travail, l’épuisement qui en découle et ses conséquences sur la qualité de la prise en charge des résidents.
Une réalité que Pascal Champvert, président de l’Association des directeurs au service des personnes âgées (AD-PA) dénonce depuis longtemps. Il demande à la ministre des Solidarités et de la Santé, Agnès Buzyn de réunir prochainement les représentants des retraités et des professionnels.
• De quoi ces grèves sont-elles le symptôme?
Pascal Champvert: "C’est un problème récurrent qui traduit le manque de moyens attribués à ce secteur. Des grèves, il y en a régulièrement, mais elles sont rarement médiatisées au-delà de l’échelon local.
Les revendications des aides-soignantes sont toujours les mêmes: "Nous ne sommes pas assez nombreuses pour effectuer le travail qui nous est demandé." Elles n’ont pas assez de temps pour accompagner correctement les personnes âgées et cela provoque de la souffrance des deux côtés. Souvent, l’Agence régionale de santé et le département lâchent un peu d’argent et cela se calme jusqu’à la prochaine crise. Les pouvoirs publics savent bien qu’ils ont affaire à des femmes peu syndiquées et non pas à des gros bras de la sidérurgie! Et puis les vieux et leurs familles ne manifestent pas…
La situation n’est pas meilleure à domicile, mais cela ne se voit pas et on en parle encore moins…
• Vous dénoncez, ainsi que la Fédération hospitalière de France, une nouvelle réforme de la tarification des maisons de retraite qui se traduirait par une diminution de 200 millions d'euros des dotations des établissements publics. La situation risque donc de s’aggraver…
P.C: Cela va entraîner des réductions de budget et donc des suppressions de postes. Le budget des établissements comprend trois volets: le tarif hébergement, payé par les résidents et qui représente 60% du coût de séjour; le tarif soins, payé par l’Assurance maladie (30%) et le tarif dépendance, financé par l’allocation personnalisée d’autonomie (APA), versée par les départements. Avant, le volet dépendance était négocié par le département avec chaque établissement, en tenant compte de ses caractéristiques propres: le nombre de résidents et leur degré de perte d’autonomie. Avec la réforme, les départements vont distribuer un budget dépendance moyen entre tous les établissements. On nous dit: c’est pour être plus équitable. Mais en fait, certains vont recevoir davantage, au détriment des autres. Les départements - qui font face à des difficultés financières importantes-, et l’Etat se sont entendus pour mettre au point un système qui restreint le poids des budgets APA. Ils savent bien que cela ne râlera pas trop dans les maisons de retraite! Il y a toujours d’autres priorités que les vieux… C’est l’une des marques de "l’âgisme" qui frappe notre société. Seule une prise de conscience par l’opinion de la nécessité de bien traiter les salariés et les résidents des établissements accueillant les personnes âgées pourra faire changer les choses.
À lire aussi:
Aide à domicile: des départements ne jouent pas le jeu
http://www.notretemps.com/famille/dependance/aide-domicile-departements-ne-jouent-pas-jeu-apa,i136847
Plusieurs établissements pour personnes âgées sont touchés par des arrêts de travail. Les aides-soignantes estiment ne pas être assez nombreuses pour s’occuper des résidents. L’analyse de Pascal Champvert, président de l’Association des directeurs au service des personnes âgées (AD-PA).
Des mouvements de grève se sont déclenchés ces dernières semaines par les personnels des maisons de retraite dans plusieurs départements: à Brest, Carhaix (29), Domme (24), Bruz et Chateaugiron (35), Romorantin (41), en région parisienne à Argenteuil, Chatenay-Malabry. Le plus emblématique, celui mené par des aides-soignantes de l’établissement Les Opalines à Foucherand dans le Jura, dure depuis le 3 avril 2017.
Au-delà de revendications salariales, les professionnels dénoncent les sous-effectifs qui nuisent à leur condition de travail, l’épuisement qui en découle et ses conséquences sur la qualité de la prise en charge des résidents.
Une réalité que Pascal Champvert, président de l’Association des directeurs au service des personnes âgées (AD-PA) dénonce depuis longtemps. Il demande à la ministre des Solidarités et de la Santé, Agnès Buzyn de réunir prochainement les représentants des retraités et des professionnels.
• De quoi ces grèves sont-elles le symptôme?
Pascal Champvert: "C’est un problème récurrent qui traduit le manque de moyens attribués à ce secteur. Des grèves, il y en a régulièrement, mais elles sont rarement médiatisées au-delà de l’échelon local.
Les revendications des aides-soignantes sont toujours les mêmes: "Nous ne sommes pas assez nombreuses pour effectuer le travail qui nous est demandé." Elles n’ont pas assez de temps pour accompagner correctement les personnes âgées et cela provoque de la souffrance des deux côtés. Souvent, l’Agence régionale de santé et le département lâchent un peu d’argent et cela se calme jusqu’à la prochaine crise. Les pouvoirs publics savent bien qu’ils ont affaire à des femmes peu syndiquées et non pas à des gros bras de la sidérurgie! Et puis les vieux et leurs familles ne manifestent pas…
La situation n’est pas meilleure à domicile, mais cela ne se voit pas et on en parle encore moins…
• Vous dénoncez, ainsi que la Fédération hospitalière de France, une nouvelle réforme de la tarification des maisons de retraite qui se traduirait par une diminution de 200 millions d'euros des dotations des établissements publics. La situation risque donc de s’aggraver…
P.C: Cela va entraîner des réductions de budget et donc des suppressions de postes. Le budget des établissements comprend trois volets: le tarif hébergement, payé par les résidents et qui représente 60% du coût de séjour; le tarif soins, payé par l’Assurance maladie (30%) et le tarif dépendance, financé par l’allocation personnalisée d’autonomie (APA), versée par les départements. Avant, le volet dépendance était négocié par le département avec chaque établissement, en tenant compte de ses caractéristiques propres: le nombre de résidents et leur degré de perte d’autonomie. Avec la réforme, les départements vont distribuer un budget dépendance moyen entre tous les établissements. On nous dit: c’est pour être plus équitable. Mais en fait, certains vont recevoir davantage, au détriment des autres. Les départements - qui font face à des difficultés financières importantes-, et l’Etat se sont entendus pour mettre au point un système qui restreint le poids des budgets APA. Ils savent bien que cela ne râlera pas trop dans les maisons de retraite! Il y a toujours d’autres priorités que les vieux… C’est l’une des marques de "l’âgisme" qui frappe notre société. Seule une prise de conscience par l’opinion de la nécessité de bien traiter les salariés et les résidents des établissements accueillant les personnes âgées pourra faire changer les choses.
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