Fisc américain. Il raconte son calvaire
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Fisc américain. Il raconte son calvaire
Publié le 28 novembre 2017 à 00h00 Modifié le 28 novembre 2017 à 07h44
Depuis un accord conclu entre la France et les États-Unis en novembre 2014, impossible pour Michel d'ouvrir un compte en banque. Il serait alors immédiatement dénoncé au Fisc américain. Seule solution : la clandestinité
Ce Breton connaît, comme des dizaines d'autres, un véritable calvaire. Né aux États-Unis mais vivant en France, il doit se cacher pour ne pas être dénoncé au Fisc américain. Témoignage.
Un ou deux livres, quelques photos anciennes prises par ses parents depuis le paquebot quittant New York. Michel (*), la soixantaine, n'a pas conservé grand-chose des États-Unis, son pays de naissance où son père travailla quelques années. Une terre qu'il quitta à deux ans à peine pour rejoindre Paris. Résidant désormais en Ille-et-Vilaine, il a la double nationalité. Et la traîne comme un boulet.
Impossible d'ouvrir un compte
Au moment du décès de ses parents, voilà trois ans, Michel doit hériter d'une somme issue d'une assurance-vie. Si la transmission ne pose aucun problème pour ses frères et soeurs, il découvre que, dans son cas, le compte est bloqué. « L'assureur commence à m'envoyer des documents sur la citoyenneté américaine. Je dois donner mon numéro d'identité. Or, je n'ai qu'un passeport français ». Le voilà pris au piège comme des milliers d'autres Français - et de nombreux Bretons. Tout ça à cause d'un accord conclu le 13 novembre 2014 entre la France et les États-Unis, visant à appliquer sur le territoire français la législation dite FATCA. Celle-ci impose aux institutions financières, où qu'elles se trouvent dans le monde, de communiquer à l'administration américaine les données fiscales de tous leurs clients américains. Comme Michel. « Alors que je n'ai rien d'américain et que je parle à peine anglais ».
« On nous pousse dehors »
Depuis cette date, impossible pour lui d'ouvrir un nouveau compte en banque. Ou alors, il prend le risque d'être dénoncé au Fisc américain. Il vit depuis dans une quasi-clandestinité. « C'est épouvantable. C'est la ruine qui peut arriver du jour au lendemain. Le fisc américain peut me demander 10.000 dollars par an, et par compte bancaire, depuis l'âge de 18 ans. Ça pourrait représenter plus d'un million de dollars ! ».
Il y aurait bien une solution : demander à perdre la nationalité américaine. Mais entre la démarche administrative, les frais d'avocat, de fiscaliste, « j'en aurais peut-être pour 80.000 dollars ! Et je devrais en plus m'acquitter des impôts aux États-Unis pendant encore cinq ans... », soupire le Breton. Autre solution : aller vivre aux États-Unis. « Car au moins la France ne nous embêtera plus. C'est elle finalement qui nous pousse dehors. On a été trahis par la République. La France nous met sur des listes et les envoie à un pays étranger », enrage Michel, qui n'a pas envie de vivre aux États-Unis. Grâce au travail de l'Association des Américains accidentels (AAA), présidée par Fabien Lehagre, la sensibilisation des élus est en cours. « Emmanuel Macron est au courant depuis longtemps mais rien n'est fait. Et les députés marcheurs s'en foutent », se désespère Michel. Un espoir néanmoins. Le député costarmoricain LR Marc Le Fur s'est saisi du problème. Il a déposé une proposition de résolution invitant le gouvernement à prendre en compte la situation. « L'idée est d'obliger le gouvernement à traiter le sujet car il concerne potentiellement pas mal de gens en Bretagne, notamment du côté de Gourin (56) », souligne Marc Le Fur. Et de dénoncer, au passage, « l'intrusion du Fisc américain en France, avec un Fisc français qui se comporte comme un lieutenant ».
Recours au Conseil d'État
Parallèlement, l'AAA a déposé une requête devant le Conseil d'État pour faire annuler le traitement automatisé d'informations par la Direction générale des finances publiques. Le Conseil d'État a désormais dix-huit mois pour statuer. En attendant, « notre mot d'ordre est de ne pas bouger », explique Michel, qui vit aujourd'hui avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête.
* Le prénom a été modifié.
-20171128-[article]&utm_source=newsletter-quotidienne&utm_medium=e-mail&utm_campaign=newsletter-quotidienne]http://www.letelegramme.fr/bretagne/fisc-americain-il-raconte-son-calvaire-28-11-2017-11757464.php?xtor=EPR-3-[quotidienne]-20171128-[article]&utm_source=newsletter-quotidienne&utm_medium=e-mail&utm_campaign=newsletter-quotidienne
Depuis un accord conclu entre la France et les États-Unis en novembre 2014, impossible pour Michel d'ouvrir un compte en banque. Il serait alors immédiatement dénoncé au Fisc américain. Seule solution : la clandestinité
Ce Breton connaît, comme des dizaines d'autres, un véritable calvaire. Né aux États-Unis mais vivant en France, il doit se cacher pour ne pas être dénoncé au Fisc américain. Témoignage.
Un ou deux livres, quelques photos anciennes prises par ses parents depuis le paquebot quittant New York. Michel (*), la soixantaine, n'a pas conservé grand-chose des États-Unis, son pays de naissance où son père travailla quelques années. Une terre qu'il quitta à deux ans à peine pour rejoindre Paris. Résidant désormais en Ille-et-Vilaine, il a la double nationalité. Et la traîne comme un boulet.
Impossible d'ouvrir un compte
Au moment du décès de ses parents, voilà trois ans, Michel doit hériter d'une somme issue d'une assurance-vie. Si la transmission ne pose aucun problème pour ses frères et soeurs, il découvre que, dans son cas, le compte est bloqué. « L'assureur commence à m'envoyer des documents sur la citoyenneté américaine. Je dois donner mon numéro d'identité. Or, je n'ai qu'un passeport français ». Le voilà pris au piège comme des milliers d'autres Français - et de nombreux Bretons. Tout ça à cause d'un accord conclu le 13 novembre 2014 entre la France et les États-Unis, visant à appliquer sur le territoire français la législation dite FATCA. Celle-ci impose aux institutions financières, où qu'elles se trouvent dans le monde, de communiquer à l'administration américaine les données fiscales de tous leurs clients américains. Comme Michel. « Alors que je n'ai rien d'américain et que je parle à peine anglais ».
« On nous pousse dehors »
Depuis cette date, impossible pour lui d'ouvrir un nouveau compte en banque. Ou alors, il prend le risque d'être dénoncé au Fisc américain. Il vit depuis dans une quasi-clandestinité. « C'est épouvantable. C'est la ruine qui peut arriver du jour au lendemain. Le fisc américain peut me demander 10.000 dollars par an, et par compte bancaire, depuis l'âge de 18 ans. Ça pourrait représenter plus d'un million de dollars ! ».
Il y aurait bien une solution : demander à perdre la nationalité américaine. Mais entre la démarche administrative, les frais d'avocat, de fiscaliste, « j'en aurais peut-être pour 80.000 dollars ! Et je devrais en plus m'acquitter des impôts aux États-Unis pendant encore cinq ans... », soupire le Breton. Autre solution : aller vivre aux États-Unis. « Car au moins la France ne nous embêtera plus. C'est elle finalement qui nous pousse dehors. On a été trahis par la République. La France nous met sur des listes et les envoie à un pays étranger », enrage Michel, qui n'a pas envie de vivre aux États-Unis. Grâce au travail de l'Association des Américains accidentels (AAA), présidée par Fabien Lehagre, la sensibilisation des élus est en cours. « Emmanuel Macron est au courant depuis longtemps mais rien n'est fait. Et les députés marcheurs s'en foutent », se désespère Michel. Un espoir néanmoins. Le député costarmoricain LR Marc Le Fur s'est saisi du problème. Il a déposé une proposition de résolution invitant le gouvernement à prendre en compte la situation. « L'idée est d'obliger le gouvernement à traiter le sujet car il concerne potentiellement pas mal de gens en Bretagne, notamment du côté de Gourin (56) », souligne Marc Le Fur. Et de dénoncer, au passage, « l'intrusion du Fisc américain en France, avec un Fisc français qui se comporte comme un lieutenant ».
Recours au Conseil d'État
Parallèlement, l'AAA a déposé une requête devant le Conseil d'État pour faire annuler le traitement automatisé d'informations par la Direction générale des finances publiques. Le Conseil d'État a désormais dix-huit mois pour statuer. En attendant, « notre mot d'ordre est de ne pas bouger », explique Michel, qui vit aujourd'hui avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête.
* Le prénom a été modifié.
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