Au Royaume-Uni, la découverte d’un bunker lève le voile sur l’armée secrète de Churchill
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Au Royaume-Uni, la découverte d’un bunker lève le voile sur l’armée secrète de Churchill
Par Valentin BIRET
Dans le sud de l’Écosse, des forestiers ont découvert par hasard un bunker dans lequel se terrait une unité très spéciale durant la Seconde Guerre mondiale. Elle appartenait à ce que l’on appelle « l’armée secrète de Churchill ».
Une porte en fer, quelque part dans une forêt dans le sud de l’Écosse. C’est la découverte qu’on fait des ouvriers forestiers, parmi les racines et les fougères, à l’automne 2019. Elle matérialise l’entrée d’un bunker, qui abritait pendant la Seconde Guerre mondiale une des auxiliary unit : ces unités de quatre à huit hommes, très secrètes et bénéficiant d’une formation spéciale, qui constituaient ce que l’on surnomme « l’armée secrète de Churchill ». Une armée si secrète que le grand public n’a réellement découvert son existence que 50 ans plus tard.
Les très secrets services britanniques
« Les Britanniques savent mieux garder les secrets que nous. D’ailleurs, contrairement à d’autres services secrets, les archives de l’Intelligence service britannique sont toujours fermées », remarque Jean-Louis Perquin, ancien parachutiste, chasseur alpin et auteur de plusieurs ouvrages sur les services secrets pendant la Seconde Guerre mondiale.
« Le secret, précisément, est à ce point essentiel que le manuel d’instruction [de ces unités] est dissimulé sous la couverture d’un catalogue [de matériel] agricole titré Highworth’s Fertilisers. En réalité, il traite d’explosifs, de cibles de sabotage potentielles ou de cordons allumeurs ! » détaille une note du Centre d’études d’histoire de la défense (CEHD).
Le groupe d’archéologie à l’origine de cette trouvaille indique que ce genre de bunkers sont très rarement mis au jour, puisque leur localisation précise a été gardée secrète, et que la plupart ont été ensevelis et détruits.
À l’intérieur, les archéologues ont découvert une pièce de 7 mètres sur 3, couverte de tôle ondulée et cernée de murs de briques. Un « mur anti-explosion », conçu comme une protection contre les grenades, sépare l’espace principal du bunker du reste. À chaque extrémité de la structure, un tuyau de ventilation de 32 cm de diamètre.
Le bunker, enterré à environ 1,3 m sous la surface du sol, servait donc de base opérationnelle pour les unités auxiliaires chargées d’opérations de sabotage en cas d’invasion.
Derrière les lignes
Avec ces troupes disséminées dans tout le pays, le Premier ministre anglais, Winston Churchill, préparait le Royaume-Uni à une éventuelle invasion… Et à un autre type de guerre, derrière les lignes.
Une décision prise peu après la défaite française de mai 1940, quand Churchill ordonne au brigadier général Collin McVean Gubbins, chef des opérations de la Direction des opérations spéciales, de former une unité secrète destinée à résister sur le sol même de la Grande-Bretagne dans l’hypothèse d’une invasion allemande. « Après l’échec de la bataille de Dunkerque, l’idée de Churchill est de rebâtir au plus vite une armée et d’avoir une stratégie offensive avec des forces spéciales », explique Stéphane Simonnet, directeur du musée d’Utah-Beach.
« Le Général Gubbins avait travaillé dans le renseignement et avait lutté contre les mouvements clandestins irlandais. Il a créé cette armée secrète qu’on appelle les « stay behind » (ceux qui restent à l’arrière) », reprend l’ex-parachutiste Jean-Louis Perquin.
« Traditionnellement, les Anglo-Saxons utilisent des milices privées et des civils. C’est une pratique typique issue d’une vieille tradition anglaise », précise une publication du CEHD.
Cette « armée secrète » sera composée de civils, volontaires, recrutés en premier lieu dans la home guard (la réserve territoriale), opérant à partir de bases secrètes. Comme couverture, les hommes de Gubbins, qui portent les uniformes de la home guard, sont affectés au bataillon 201 (Écosse), au 202 (nord de l’Angleterre) ou au 203 (sud de l’Angleterre).
Une image orthophotographique du bunker, montrant sa position souterraine. (Image : AOC Archeology group)
Les voyous de Churchill
3 500 hommes, la plupart issus de la société civile, auraient été formés à l’art de la guérilla, y compris l’assassinat, le combat à mains nues, la démolition et le sabotage.
Chaque patrouille était une cellule autonome devant être autosuffisante et opérationnellement autonome, opérant généralement dans un rayon de 15 miles. 400 à 500 de telles bases auraient été construites.
Les patrouilles disposaient également de quelques-unes des dernières armes, comme les pistolets silencieux, le pistolet-mitrailleur Sten, des explosifs, des engins incendiaires et de la nourriture pour tenir deux semaines. Les membres étaient prévenus qu’ils seraient tués s’ils étaient capturés, et on attendait d’eux qu’ils se suicident plutôt que d’être pris vivants. L’espérance de vie d’un « scallywag » – surnom donné aux membres de ces unités, qui peut se traduire par « voyou » – n’aurait été que de deux semaines.
L’armée secrète en France
Comment étaient-ils recrutés ? « Il y avait forcément beaucoup de cooptations. Pour organiser quelque chose de secret, cela se fait de connaissance à connaissance. On ne vient pas frapper à votre porte comme cela », raisonne Jean-Louis Perquin.
Même si d’épais mystères entourent encore cette « armée de Churchill », on dit que de nombreuses unités avaient dans leurs rangs des propriétaires terriens et des agriculteurs, qui avaient une connaissance fine de la région. « Même si les cadres sont des officiers, c’est une armée de volontaires. On y retrouve des anciens policiers, des ex-militaires de la Marine, qui suivent des entraînements clandestins au combat rapproché. Toutes ces forces spéciales ont un côté mercenaire », résume Stéphane Simmonnet.
Finalement, ces unités auxiliaires, maintenues jusqu’en 1944, ne combattront jamais sur le sol anglais. Mais plusieurs de ses membres ont ensuite rejoint le Special Air Service, une unité de forces spéciales des forces armées britanniques.
Ils se serviront de leur expérience et de leur entraînement pour combattre pendant la campagne en France fin 1944, notamment au sein des opérations Houndsworth, à Dijon, et Bulbasket, dans la Vienne.
ouest france
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