2 janvier 1915, Emmanuel HUET-TANQUEREY a 27 ans

2 janvier 1915, Emmanuel HUET-TANQUEREY a 27 ans, au front depuis peu. Séminariste (sous-diacre) après une formation à Caen, a été incorporé comme sergent brancardier, il écrit à sa sœur :

"Je viens de faire mon premier enterrement...je portais dans un verger un caporal du 236e mort cet après-midi. Deux hommes de sa compagnie avaient préalablement creusé la fosse au clair de lune pendant que je faisais les derniers préparatifs (mise du décédé dans son sac de couchage, bouteille cachetée contenant les renseignements à son sujet, procès verbal des objets trouvés sur lui,...). L'enterrement n'a pas été long car, si la canonnade ne se fait pas entendre, obligeant à rester dans la cave du poste de secours comme dans l'après-midi, les balles sifflent continuellement la nuit. L'une d'elle est même venue casser une branche du pommier, aussi, nous ne nous sommes pas attardés après le Pater, l'Ave et le De Profundis. Tout cela par un clair de lune superbe qui facilite heureusement les allées et venues, car il y a une boue et un bouillon très épais dehors."

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Hervé Graffe
Mon cousin, Patrice RETOUR, petit-neveu d'Emmanuel HUET-TANQUEREY, a produit un remarquable travail d'historien pour retrouver des archives, écrire et éditer une biographie étonnante. Emmanuel HUET-TANQUEREY, cet homme libre, imprégné des idées humanistes du Sillon, aura connu les deux guerres, la première comme brancardier la deuxième comme résistant (médaillé à Londres) et aumônier de la prison de la Santé. (Il aurait entre autre accompagné les derniers instants du Dr Petiot).

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Suite de la lettre d'Emmanuel HUET-TANQUEREY du 2 janvier 1915 :
"Ce pauvre caporal, (Lucien Paul Émile MAUJARET), marié et père de deux petits garçons, avait eu le thorax perforé ce matin. Amené ici de la tranchée par deux d'entre nous, son état avait été jugé très grave. Il souffrait beaucoup, aussi je lui ai demandé s'il voulait que j'aille chercher un sergent-prêtre à la 17ème compagnie."C'est donc si grave que cela ?" m'a t il demandé. "Mon Dieu, pas tout de suite, mais je vais te faire évacuer par la voiture divisionnaire. Tu peux souffrir davantage pendant le transport et être plus faible ensuite. Comme ça, ce sera fait et tu seras plus tranquille ensuite.-- Alors je veux bien"... et j'ai eu la joie de pouvoir faire confesser ce pauvre blessé. Il souffrait tellement qu'il demandait ensuite à mourir. Il a trouvé l'adresse de sa femme, dit de lui envoyer son alliance, dit de la prévenir seulement d'une blessure qu'il avait au bras droit. Il est mort quelques heures après. "

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Retour en arrière : 24 décembre 1914, Emmanuel HUET (236e RI) retrouve son beau-frère, Maurice RETOUR (205e RI) près de Bray sur Somme après l'attaque de Mametz. Maurice RETOUR, est au front depuis le 13 août.
Emmanuel avait quitté Caen le 16, il écrit à sa sœur Yvonne, l'épouse de Maurice : " Je te laisse à penser si nous avons bavardé de tous et de tout, comme deux frères si heureux de se revoir. Je suis un peu ton prolongement dans la circonstance, et tu comprends que tout ce qui te rappelle lui fait plaisir... Son entrain et sa gaieté sont constants. C'est un bonheur de vivre près de lui, les hommes ont bien raison de l'aimer comme ils le font, et je vois au mess des officiers combien il est sympathique à tous... Il a un vrai tempérament pour faire campagne : il n'a pas froid, ne sent pas ses pieds mouillés, ne sent pas la fatigue, etc."