Grand Saint-Brieuc. L'idée séduit

Les deux rives du Légué, symbole d'un éventuel Grand Saint-Brieuc ?


Une commune nouvelle réunissant Saint-Brieuc et ses voisines Plérin, Langueux, Trégueux ou encore Ploufragan. L'idée - émise mardi soir par Bruno Joncour - n'a pas tardé à faire son chemin. Si Rémy Moulin (Ploufragan) et Christine Métois (Trégueux) ne sont pas franchement emballés, Térèse Jousseaume (Langueux) et Ronan Kerdraon (Plérin) le sont nettement plus. Alors, bientôt la naissance de Saint-Brieuc-sur-Mer ?

« Aujourd'hui, nous sommes au moment du flirt. Mais, demain, nous pouvons avoir envie d'aller plus loin... » Mais de quoi parle Ronan Kerdraon, le maire de Plérin ? De fusion de communes bien sûr. Mardi soir, lors de ses voeux, Bruno Joncour a en effet nom obligatoire ses voisins « à réfléchir » à l'idée « d'une ville nouvelle ». Un Grand Saint-Brieuc, synonyme « d'opportunité pour une nouvelle communauté de vie et de destin », a clamé le maire de Saint-Brieuc.


« Voir au-delà des clivages politiques »

Cette proposition a, dès hier, trouvé un écho certain du côté de Plérin. « L'idée de Bruno Joncour, je la partage. Notamment en raison du contexte global des finances des collectivités. Mais aussi parce que nos deux villes ont une histoire commune, entre autres avec le port du Légué. D'ailleurs, quand je suis au quai Armez, je ne me sens pas à l'étranger, mais un peu comme chez moi », lance Ronan Kerdraon, qui se sent même « aussi Briochin qu'un habitant de Saint-Brieuc ». Selon le socialiste, le débat doit donc absolument avoir lieu. « Il faut approfondir et voir au-delà des clivages politiques et des querelles de chapelle. »



Yffiniac et Hillion invitées aussi

Même engouement de l'autre côté de Saint-Brieuc, à Langueux : « L'invitation est intéressante et la démarche sensée. Notamment au regard des difficultés financières de nos communes, mais également en raison de la complexité croissante de la réglementation », estime Térèse Jousseaume, soucieuse cependant de préserver « la proximité » avec les habitants. « C'est ma seule crainte », expose la maire de Langueux, qui inviterait par ailleurs volontiers Yffiniac et Hillion à plancher sur ce ménage à plusieurs. Ceci afin de bénéficier « d'une continuité littorale de Plérin à Hillion ».



Rémy Moulin « surpris »

Eux aussi, voisins directs de Saint-Brieuc, les maires de Ploufragan et Trégueux ne sont pas vraiment sur la même ligne. Rémy Moulin et Christine Métois ne déclinent pas officiellement l'invitation de Bruno Joncour. Mais c'est tout comme... « Je suis un peu surpris des déclarations de Bruno Joncour. Nous n'avons pas eu d'échanges sur le sujet au préalable. Et l'idée, même si elle peut paraître intéressante, n'est absolument pas d'actualité. Nous ne sommes pas du tout dans cette démarche », répond ainsi le maire de Ploufragan. « C'est un projet qui me semble un peu lointain », juge, de son côté, son homologue trégueusienne.



Un référendum pour trancher le débat ?

À ce stade, l'idée lancée par Bruno Joncour, si elle ne convainc pas tous ses voisins, a donc trouvé quelques partisans. Mais Térèse Jousseaume, comme Ronan Kerdraon, ne veulent pas se précipiter. « Un tel projet ne peut pas se décréter. La création d'une commune nouvelle nécessite une véritable réflexion. Ça ne se fera pas en six mois ou un an », se projette la maire de Langueux, qui n'exclut pas d'en « passer par un référendum ».



Ronan Kerdraon : « Osons ! »

Même vision des choses pour le maire de Plérin : « Il faut que l'idée soit totalement partagée et acceptée par les élus, le personnel municipal et la population. Mon avis personnel, c'est que nous avons trois ans, avant les prochaines élections municipales, pour préparer les choses. » Et pour Ronan Kerdraon, tant pis si toutes les communes limitrophes de Saint-Brieuc ne répondent pas tout de suite à l'appel de Bruno Joncour : « Il faut des gens pour oser. L'Europe, c'est d'abord fait à six, puis à neuf. Il faut une avant-garde. Alors osons ! »


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Déjà six communes nouvelles


Dans les Côtes-d'Armor, six communes nouvelles sont nées le 1er janvier dernier. La commune nouvelle de Ploeuc-L'Hermitage est ainsi constituée des anciennes communes Ploeuc-sur-Lié et de L'Hermitage-Lorge. La commune nouvelle de Le Mené est, elle, constituée des communes de Collinée, Langourla, Le Gouray, Plessala, Saint-Gilles-du-Mené, Saint-Gouéno et Saint-Jacut-du-Mené. Celle de Jugon-les-lacs ? commune nouvelle regroupe Jugon-les-lacs et Dolo. Mariage à deux également pour la commune nouvelle de Pordic, fruit de l'union entre Pordic et Tréméloir. Quant à la commune nouvelle de Lamballe, elle est constituée des communes de Lamballe et Meslin. Enfin, la commune nouvelle de Les Moulins accueille Plémet et La Ferrière.

Des avantages financiers jusqu'au 30 juin 2016

Toutes les communes ayant fusionné avant le 31 décembre 2015 jouissent d'importants avantages financiers (exonération de la baisse des dotations de l'État pendant trois ans et majoration de 5 % de la dotation globale de fonctionnement pour les communes entre 1.000 et 10.000 habitants). Sur décision des députés, cette « carotte financière » pourra également bénéficier aux communes nouvelles créées avant le 30 juin 2016 (mais dont les conseils municipaux auront délibéré avant le 31 mars prochain).


Ce qu'ils en pensent...
Propos recueillis par Roselyne Veissid Mireille Dubois, ancienne première adjointe (UMP, à l'époque) de Plérin dans la municipalité Le Faucheur : « Cette idée ne me choque pas du tout. Cela permettrait d'en finir avec les querelles de clochers. Saint-Brieuc ne peut pas grandir, et c'est une faiblesse nuisible à notre département de ne pas avoir pour chef-lieu une ville plus importante. Il faut la muscler, c'est le moyen de faire progresser les Côtes-d'Armor. Mais il sera nécessaire de prendre garde à ne pas trop centraliser les services. Plérin est une ville à identité forte avec des quartiers à personnalité très marquée. Tout cela demandera beaucoup de doigté à Bruno Joncour, mais je ne doute pas qu'il en soit capable. À mon avis, il faudra passer par le stade intermédiaire des communes associées, avant d'en arriver à la fusion pour les municipales de 2020. » Claude Saunier, ancien maire socialiste de Saint-Brieuc : « Lancée dans les années 70 à l'occasion d'une première loi de réorganisation territoriale, cette idée avait été reçue comme une manifestation d'impérialisme de la ville-centre. Elle a par réaction retardé de trente ans la démarche intercommunale. Aujourd'hui, le temps est venu d'ouvrir de nouvelles perspectives. Par exemple, la plage des Rosaires est incontestablement la plage des Briochins. Le principe de sa prise en charge par un grand Saint-Brieuc ne serait pas aberrant. Certes, les gens sont attachés aux contours de leurs communes, qui avaient une cohérence parce qu'ils étaient hérités des anciennes paroisses. Mais il faut savoir si l'on se cramponne à une réalité historique ou si l'on se projette dans l'avenir. Les bassins de vie d'aujourd'hui ne sont pas ceux d'hier ! » Didier Simon, ancien directeur de l'office de tourisme de la Baie : « Une fusion avec Plérin ferait de Saint-Brieuc une vraie ville littorale. Mais en matière touristique cela ne changerait pas grand-chose, car l'office a déjà depuis longtemps développé son action par-delà les frontières communales. » « Les gens qui viennent sur notre territoire s'intéressent à des services, à des sites, pas aux frontières administratives, renchérit Mickaël Cosson, président du même organisme. Aujourd'hui, de Paimpol au cap Fréhel, nous sommes 17 offices de tourisme à travailler ensemble. Nous avons largement dépassé le stade de la commune et même de l'intercommunalité ! » Pierre Le Bris, Plérinais cofondateur de l'association des habitants du Légué : « Pour moi, c'est non avec un grand N ! Saint-Brieuc s'est trop longtemps désintéressée du Légué, et cherche maintenant à récupérer le quartier rénové. Entre cette ville et nous, il y a une rivière, et c'est très bien comme ça ! » Yves Resmond, patron du bar « Les Mouettes » au Légué (côté Plérin) : « Ça me paraît un peu difficile, les municipalités ne sont pas du même bord... Ici, les gens sont du Légué avant d'être de Plérin ou de Saint-Brieuc. Mais je crois qu'une fusion pourrait apporter plus de dynamisme autour du port. »

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