Il y a 75 ans jour pour jour, la ville de Metz, en Moselle, était officiellement libérée !

Un grenadier allemand avec son Panzerschreck (arme anti-char), à Maizières-lès-Metz, le 27 octobre 1944





Un véritable soulagement pour la population et pour les soldats américains qui combattent sans relâche depuis presque 3 mois.

Bataille méconnue et oubliée, la bataille de Metz, rappelée tous les jours par nos amis de Metz en Guerre, est l'une des plus terribles qu'a eu à affronter l'armée américaine en France.

Voici l'histoire de cette longue bataille

Tout commence à la fin du mois d'août 1944. L'armée américaine, après avoir libéré Paris, fonce vers l'Est de la France à toute vitesse, comme si rien ne pourrait l'arrêter.

Alors que le 31 août les allemands quittent la ville précipitamment, la population s'imagine déjà une libération rapide. Mais il n'en est rien.

Pour rappel, la Moselle et l'Alsace sont annexés au IIIe Reich allemand, et font partie intégrante du territoire allemand. Il faut donc coûte que coûte stopper les alliés sur les frontières du Reich. Le 2 septembre 1944, la ville de Metz est déclarée forteresse du Reich par Hitler : les hommes doivent la défendre jusqu'au dernier tué. Et ce ne sont pas les troupes qui manquent : Soldats de la Wehrmacht, PanzerDivision, Divisions SS, et même des "Fahnenjunkern" (élèves-officiers) sortant fraîchement de l'école et très motivés à en découdre.

La 3ème Armée américaine, sous le commandement du général Patton, veut faire vite. Peut-être trop vite. Les lignes de ravitaillement s'allongent, le carburant fait défaut. Les américains ont une piètre connaissance du terrain, et ne connaissent pas l'étendue des fortifications messines, les "Feste" construites par l'Empire Allemand avant la 1ère Guerre Mondiale, véritable ancêtre de la ligne Maginot. Les américains utilisent de vieilles cartes routières et sont persuadées qu'il y a là de vieux forts sans défenses.

La réalité est tout autre : La ville est équipée deux ceintures fortifiées, la plupart des forts sont en béton armé avec des moyens d'artillerie sous tourelles conséquents (100mm; 150mm). Les grands ouvrages, appelés Feste en allemand , se composent de plusieurs casernes et batteries, reliés par des souterrains. Se trouvent également sous terre, les commodités de vie : Cuisines, Infirmerie, Usine électrique pour assurer une autonomie en électricité, etc... exactement comme dans les ouvrages Maginot qui seront construits 20 après les Feste. Les Feste se comptent par dizaines, les blockhaus divers par centaines. La ligne de fortification appelée "Mosellstellung" entoure les villes de Metz et de Thionville. Tous les forts sont occupés, les troupes sont mises en alerte.

Mais Patton veut foncer et les américains vont en payer le prix. L'objectif dans un premier temps, est de traverser la Moselle. Mais partout, les américains sont repoussés. Les pertes sont sévères. Lorsqu'ils s'approchent un peu de Metz, les forts leurs tirent dessus avec leur puissante artillerie et les américains subissent des revers cuisants.

Les allemands défendent la Moselle du Nord au Sud avec acharnement. Le 7 septembre, les américains prennent pied sur l'autre rive de la Moselle à l'Ouest de Metz, parvenant à briser un moment la résistance allemande.

Photographie de l'équipe Anti-Tank de Fletcher B. Cox prise à Metz en Novembre 1944.

Mais des renforts arrivent en masse, avec des chars, brisant la résistance de l'infanterie américaine. Le 10 septembre, les troupes sont rejetées de l'autre côté de la Moselle après des combats acharnés. Les américains auront perdu presque 1000 hommes dans cette tête de pont échouée.

Cependant, ce n'est que partie remise, les américains arrivent à nouveau à établir une tête de pont plus au Sud, et cette fois-ci, ils tiennent, grâce au soutien de l'aviation en partie. Les allemands déchaînent un déluge de feu contre eux, mais subissent également des pertes.

Les 15 et 16 septembre, les américains se mettent alors comme objectif de prendre plusieurs ouvrages fortifiés tenus par les allemands, cependant, malgré une puissante attaque avec des Tanks Destroyers, des lances-flammes, et d'autres moyens, les fortifications tiennent bon, et les américains sont contenus.

Devant l'incroyable ténacité des allemands, les américains décident de se contenter de tenir leurs positions face aux ouvrages fortifiés.Toute attaque est suspendue.
La Porte des Allemands, un vestige de l'ancienne muraille de Metz, après la bataille de Metz.

Les américains commencent à mener des opérations sur le secteur Sud du Metz, contre les forts s'y trouvant. Le 19 septembre, le mitraillage par avion d'un camion se trouvant devant l'ouvrage de Mercy (groupe fortifié de la Marne) contenant des ogives de torpilles, le fait flamber. Elles explosent, et l'onde de choc se propageant dans le fort, tout le stock de torpilles explose. L'ouvrage de Mercy, la plus grande caserne fortifiée de la seconde ceinture fortifiée de Metz, vole en éclats, projetant des blocs de béton armé de plusieurs tonnes à plus d'un kilomètre. 88 allemands périront dans l'explosion.

Vers le 20 septembre, les troupes allemandes commencent à perdre du terrain et la situation semble tourner à l'avantage des américains.

Pourtant, le 23 septembre, la IIIe armée de Patton doit cesser l'offensive, la situation se dégradant sur d'autres fronts (Hollande).

Le 26 septembre, les américains bombardent intensivement les forts de Metz au Napalm. Les dégâts ne sont pas importants, les ouvrages en béton armé résistant bien aux bombardements.

Le 27 septembre, les américains décident de s'emparer par les armes du groupe fortifié Driant (Feste Kronprinz) , un imposant fort se constituant de 5 batteries d'artillerie (20 canons sous tourelle) , plusieurs casernes bétonnées, et de très nombreux souterrains reliant le tout. C'est un des forts les plus vastes de Metz.

Cependant, les américains ne parviennent pas à approcher du fort, défendu avec acharnement par les allemands. Mais ils tiennent à prendre ce fort clé dans la défense du secteur qui les gênent. Ils mettent de puissants moyens dans l'offensive.

Le 3 octobre, les américains parviennent à capturer l'une des casernes du groupe fortifié Driant à un prix sanglant. Les combats se poursuivent dans les souterrains, au corps à corps. Alors que les américains assiègent toujours le fort Driant, les allemands mènent des contre-attaques depuis le fort, faisant même des prisonniers !

Les américains font alors relever leurs troupes. Le 7 octobre, une nouvelle attaque est menée avec ces troupes fraîches, mais les allemands, malgré leur situation critique, repoussent l'assaut américain dans l'énergie du désespoir. La bataille du fort Driant est un nouvel échec pour l'armée américaine. Du 12 au 13 octobre, ordre est donné aux troupes de se replier durant la nuit.

Les américains, qui ont pris la décision de contourner Metz par le Sud et le Nord pour encercler la forteresse, se contenteront pour l'instant de profiter d'un bon répit tout en maintenant leurs positions. Les allemands profitent de cette accalmie pour se réorganiser. La situation est plutôt "calme" dans cette deuxième moitié d'octobre sur le front de Metz.

Au Nord, les américains ont ordre de prendre Maizières-les-Metz, ville clé pour le passage vers Metz. Mais l'attaque piétine. Les troupes allemandes résistent au pied à pied, maison par maison. Les américains mettent les gros moyens : la petite ville est pilonnée par l'artillerie sans relâche, se transformant en ruine fumante. Les bâtiments restants sont pris un à un par les américains au bazooka et au lance-flammes, au prix de très lourdes pertes dans les 2 camps. Le 30 octobre, Patton savoure cette victoire dans les ruines de Maizières, surnommée "Maizie la sanglante" par les américains.

Les verrous Sud et Nord de Metz étant tombés, les américains décident de contourner la ville et d'attaquer par l'Est.

En novembre, les combats reprennent de plus belle.

Cependant, durant la brève accalmie pour les troupes situées à l'Ouest et au Sud de Metz, les américains ont été formés au combat de forteresse et ont pu tester diverses méthodes pour faire flancher les fortifications de la Moselstellung.

Le 8 novembre, l'étau se resserre. En prélude à la grande offensive, les américains envoient 1300 bombardiers déverser 3753 tonnes de bombes sur les forts de Metz désignés comme cibles prioritaires. Mais la météo et la mauvaise visibilité en décident autrement, les objectifs sont rarement atteints, et il n'y aura que des dommages collatéraux.

Après la reddition du dernier fort de Metz, le groupe fortifié Jeanne d'Arc (Feste Kaiserin), le 13 décembre 1944, les américains viennent planter leur drapeau sur l'une des casernes bétonnées.

Le 12 novembre, l'ordre est donné d'évacuer la ville. Le 14 novembre, le général Kittel est nommé commandant de la place forte de Metz. Les troupes américaines passent à l'assaut sur tous les fronts.

S'ils ne parviennent pas à s'emparer des plus gros forts à l'Ouest et au Sud de Metz, ces derniers sont maintenant encerclés et les américains sont parvenus à franchir les lignes pour atteindre la Moselle. Ils ont également mis la main sur de nombreux petits ouvrages.

Le 15 novembre, les américains s'approchent de la ville par le Nord-Est, et se heurtent maintenant à la résistance acharnée des forts de la 1ère ceinture !

Qu'à cela ne tienne, les américains savent désormais comment neutraliser les forts : Ils les attaquent un à un, avec des moyens considérables, les encerclant, les attaquant par tous les côtés jusqu'à la capitulation de la garnison.

Les 17 et 18 novembre, les attaques se poursuivent sur les fortifications e la 1ère ceinture et les américains sont aux portes de Metz. Le 18, 50 américains pénétrant dans une caserne fraîchement prise meurent dans le souffle d'une explosion. Les allemands avaient piégés l'édifice.

Si la plupart des forts résistant encore sont encerclés, ils continuent d'opposer une résistance acharnée. Les forts de la 1ère ceinture à l'Est finissent par se rendre un à un, mais à l'Ouest les gros forts de la Seconde Ceinture tiennent toujours et repoussent les assauts.

Toujours le 18 novembre, alors que les américains traversent l'un des grands ponts au dessus de la Moselle, celui-ci est dynamité par les allemands envoyant par le fond toute une section d'assaut américaine.

Cependant, les allemands qui défendent Metz sont maintenant coupés des troupes dans les fortifications.

Le 19 novembre, les quartiers de Metz commencent à être pris un par un, mais des allemands mènent une résistance désespérée dans certaines casernes ou bâtiments administratifs. Les américains nettoient la ville maison par maison.

Le 21 novembre, ils capturent le commandant de la place de Metz, le général Kittel, blessé, qui refuse pourtant de capituler.

Le 22 novembre, c'est la fin. Les derniers combats ont lieu sur l'île de Chambières ou dans des bâtiments administratifs (Préfecture,..). A 10h, lors d'une cérémonie officielle, le général Walker remet officiellement la ville de Metz au général français Doddy. Vers 14h35, tous les combats sont terminés dans Metz, qui est maintenant.

Pourtant, les plus gros forts autour de la ville tiennent toujours.

Encerclés, ils se rendent successivement fin novembre, et début décembre. Le dernier à se rendre sera le groupe fortifié Jeanne d'Arc (Feste Kaiserin) le 13 décembre 1944, soit après plus de 3 mois de siège.

Ainsi se termine la terrible bataille de Metz, qui aura bloqué les américains pendant près de 3 mois. Les allemands ont atteint leur objectif : ralentir suffisamment les américains pour se retirer en bon ordre vers la Sarre et organiser une solide ligne de défense sur la ligne Siegfried. La première partie de la bataille de Metz, bien que se soldant par une victoire alliée, est considérée comme l'un des premiers échecs de Patton. Non loin, le cimetière américain de Saint-Avold, avec plus de 10 000 tombes, est le plus grand de toute l'Europe, preuve des terribles batailles menées par les américains sur le sol lorrain.

Mais les batailles de ce type sont loin d'être terminées. Plus à l'Est, aux confins de la Moselle et de l'Alsace, une autre bataille, aussi méconnue, qui tiendra les américains en échec de début décembre 1944 à mars 1945, vient de débuter. C'est la bataille de Bitche. (https://www.facebook.com/historateurs/posts/412846859441808)


Le commandant du groupe fortifié Jeanne d'Arc, (Feste Kaiserin), se rend aux américains le 13 décembre 1944.

C'était le fort le plus puissant de la région et fut capable de résister aussi longtemps car il avait été réapprovisionné juste avant que la campagne ne commence.

Ce fort a été capturé par la 26th Infantry Division qui était dans cette zone à cette date



Le bombardement du groupe fortifié Verdun (Feste Haensler) au Sud de Metz, par des P-47 du 19e Tactical Air Command, en septembre 1944.


Lors des combats à l'intérieur de la ville de Metz, les américains doivent nettoyer chaque maison, les foyers de résistance allemande étant nombreux.

Début septembre 1944, la IIIe Armée du général Patton est stoppée devant la puissante résistance allemande des forts de Metz.


Des soldats américains de la 5th US Division et la 95th US Division faisant leur jonction devant le panneau allemand de la ville de Metz.

Photo prise dans le quartier actuel de Vallières.


En 1940, Heinrich Himmler passe en revue ses troupes au fort de Plappeville (Feste Alvensleben). Il en profitera pour inspecter les fortifications messines.

En septembre 1944, il va réorganiser tout le secteur, ayant une bonne connaissance du terrain


Soldats du 377e Infantry Regiment dans le quartier des Quatre-Bornes, le 17 novembre 1944.


Vue sur la cathédrale de Metz et les ruines de la ville, après les combats.


Vue aérienne sur l'ouvrage d'infanterie central du groupe fortifié Driant (Feste Kronprinz) que les américains tenteront de prendre sans succès.

Il faut encore ajouter à cela de nombreuses casernes bétonnées, 5 batteries d'artilleries, etc.. pour se rendre compte de la grandeur du fort.

Les Historateurs